Andrew Wyeth 1917 - 2009 |
jeudi 31 juillet 2014
lundi 28 juillet 2014
La crise humanitaire s'aggrave à Gaza
«La crise humanitaire
s'aggrave à Gaza»
Le Figaro
Mis à jour le 28/07/2014 à 18:28
Publié le 28/07/2014 à 18:11
INTERVIEW - La journée de lundi a été marquée par une trêve tacite entre les deux parties puis par l'annonce d'une dizaine de victimes, dont des enfants, lors de violents combats. Alors que les ONG, dont Handicap international, signalent que la bande de Gaza manque de médicaments et de produits de première nécessité pour faire face.
Malgré une trêve tacite observée à l'occasion de l'Aïd el Fitr, des combats ont eu lieu lundi à Gaza entre l'armée israélienne et le Hamas. En fin de journée, il était fait mention d'au moins 7 enfants palestiniens tués dans un camp de réfugiés à Gaza et lors d'une explosion dans l'enceinte du plus grand hôpital du territoire palestinien. Le Hamas accuse Israélien qui soutient qu'il s'agit du résultat d'au moins un tir raté de roquettes. Dans le même temps, un obus de mortier tiré de Gaza vers le sud d'Israël a tué au moins quatre Israéliens.
Par la voix de son chef de mission Guillaume Zerr, Handicap international décrit une situation humanitaire catastrophique sur place et appelle à une trêve humanitaire pour subvenir aux besoins les plus urgents de la population.
LE FIGARO - Quelle est la gravité de la situation humanitaire à Gaza?
GUILLAUME ZERRE - Elle s'aggrave de jour en jour. La quasi-totalité de la population gazaouie est affectée. On compte un peu plus de 215.000 déplacés dans les écoles et bâtiments publics transformés en centres d'évacuation. Ce chiffre ne prend pas en compte tous les déplacés qui s'appuient sur leurs réseaux familiaux ou amicaux. En trois semaines, le conflit a fait plus de 1040 morts et bientôt 6000 blessés sur la bande de Gaza. Les foyers ont à peine quatre heures d'électricité par jour. Cela pose de graves problèmes pour l'accès à l'eau, qui se fait par pompe électrique. Depuis l'opération terrestre, le nombre de morts et de blessés a beaucoup augmenté, selon les chiffres publiés par le ministère de la Santé de Ramallah.
Comment les hôpitaux gèrent-ils l'afflux de blessés?
Les structures de santé étaient déjà en grande difficulté avant le conflit. Mais elles sont désormais totalement débordées. Depuis le début des bombardements sur Gaza, vingt centres médicaux ont été détruits. Lors des deux précédents cessez-le-feu, nos onze collaborateurs sur place se sont rendus dans les hôpitaux pour évaluer l'ampleur des besoins. Ils ont vu des blessés traités dans les couloirs, quasiment sur le sol. Les médecins spécialistes manquent pour intervenir sur les blessures les plus graves. Les médicaments et les produits de première nécessité font défaut, notamment à cause du blocus.
Vous appelez donc à une trêve humanitaire.
Il est urgent d'obtenir un cessez-le-feu durable pour accéder aux blessés et leur répondre à leurs besoins les plus urgents. Mais un simple retour au statut quo ne réglera pas la crise humanitaire. Nous espérons que les deux parties arriveront à un accord permettant la levée du blocus sur Gaza. Lors du dernier cessez-le feu, nous avons fait une première donation d'une centaine d'instruments d'aide à la marche (fauteuils roulants, cannes et béquilles) à l'hôpital d'al-Shifa. Il est impossible d'en faire parvenir de l'extérieur, mais nous avons pu collecter sur place une autre cargaison. Nous sommes également en contact avec les organisations locales. Lorsque les conditions seront réunies, nous enverrons également des ergothérapeutes, kinésithérapeutes et psychologues pour traiter les blessés sur place.
jeudi 24 juillet 2014
Catherine Deneuve / L'homme qu´on aimait trop
Catherine Deneuve
L´HOMME QU'ON AIMAIT TROP
André Téchiné:
«Catherine Deneuve me fascine car c’est un sphinx»
Fabienne Bradfer
Mis en ligne
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Pour leur septième collaboration, le réalisateur donne, dans « L’homme qu’on aimait trop », le rôle d’une vraie dure à Catherine Deneuve.
« Mon film n’est pas un polar à la Agatha Christie. Il ne s’agit pas pour moi de savoir qui a tué Agnès Le Roux, si Agnelet est coupable ou non. Ce qui m’a intéressé, c’est la puissance du doute. » |
Pour son vingtième long-métrage, L’homme qu’on aimait trop, André Téchiné se confronte pour la deuxième fois aux faits divers. Après La fille du RER, qui revenait sur la médiatisation d’une fausse agression à caractère antisémite en juillet 2004, il s’inspire d’une extraordinaire énigme judiciaire, l’affaire dite « Le Roux ». L’enquête sur la disparition en 1977 d’Agnès Le Roux, héritière du Palais de la Méditerranée, mettant en cause son amant de l’époque, l’ex-avocat niçois Jean-Maurice Agnelet, est entre les mains de la justice depuis une trentaine d’années et a déjà fait l’objet de trois procès. Et ce n’est pas fini.
En avril dernier, le fils d’Agnelet accuse son père d’avoir commandité l’assassinat d’Agnès Le Roux. Agnelet est condamné à 20 ans de réclusion criminelle. Il se pourvoit en cassation. Parler d’une affaire dont l’issue judiciaire est toujours incertaine a-t-il eu une influence sur votre travail ?
Je ne voulais montrer que le premier procès, quand Agnelet a été acquitté. J’indique juste ensuite que les décisions de justice peuvent être contradictoires. Après le tournage et le montage, il y a eu un troisième procès. Avec un rebondissement que je n’avais pas prévu dans le scénario et qui était l’accusation du fils, qu’on voit au premier procès, être ému et soutenir son père. A un moment, ils ont donc été très proches. J’aurais pu montrer le même personnage au moment où il accuse son père mais là, le film était déjà terminé. Ce qui est très fort dans cette affaire, c’est que ça dépasse la fiction. Dramaturgiquement, la réalité a finalement été supérieure à toute construction de scénario. C’est bizarre, car je ne voulais pas faire un film trop noir, en terminant sur l’acquittement. Mais dans la réalité, la suite, ce sont deux autres procès où il a été condamné.
Votre film repose sur le trio Agnès Le Roux, sa mère Renée Le Roux et Agnelet. Qu’est-ce qui vous a attiré en eux ?
Leur interréaction. On peut résumer ça par des rapports de domination. Chaque caractère dans sa singularité me fascine. La femme à poigne, autoritaire et souveraine ; la princesse héritière, l’insoumise ; et puis ce faux prince charmant. On voit tout de suite la dimension conte de fée, mais à l’envers. Je trouvais ça absolument formidable alors que les éléments sont puisés dans la réalité. Il y a aussi cet aspect luxueux, magique, avec la Riviera, la Côte d’Azur, le monde des casinos, la sophistication, l’opulence, le pouvoir destructeur de l’argent. Ça me paraissait être un masque tragique intéressant. J’ai vraiment respecté les personnages, les événements mais en même temps, ils sont plus forts que nature.
Quelles sont les contraintes que vous impose la fiction ?
Pour «La fille du RER» , juridiquement, je n’avais pas le droit de trop m’inspirer de ce que la personne avait vécu. J’ai été contraint d’inventer. Ici, je n’avais pas de contraintes. J’ai eu accès aux vraies lettres, aux enregistrements magnétiques grâce au frère d’Agnès. Tout est absolument vrai. Guillaume Canet a été en relation avec Agnelet quand il était en résidence surveillée à Chambéry. Je voulais que Guillaume connaisse sa voix et son discours. Car Agnelet est extrêmement cultivé. Ça aussi c’était une belle idée de scénario : quelqu’un qui lit les grands auteurs de la Pléiade mais qui n’est intéressé que par l’argent. Il y a une dualité passionnante. Il dit des choses intéressantes, même pour l’espèce humaine. Guillaume recevait des coups de téléphone, des SMS d’Agnelet et me les transmettait. Il disait à Agnelet que j’avais changé des scènes. Pendant le tournage, il y avait donc non pas une collaboration, mais une circulation d’informations. Guillaume me racontait, j’écrivais et on tournait. Ce film est très factuel.
Vous n’avez pas eu peur d’une manipulation de sa part ?
J’ai rédigé une scène qui est peut-être mensongère, mais ce sont alors les mensonges d’Agnelet. Souvent, les films sont ennuyeux car les gens ne mentent pas assez. Là, ce qu’il y a de formidable, c’est qu’on ne sait pas. Agnelet est une sorte de metteur en scène. Non seulement il enregistre toutes ses conversations au téléphone, mais il les monte. C’est un travail d’artisanat qui prend beaucoup d’énergie et de temps.
Vous n’avez pas été tenté de vous concentrer plus sur le procès ?
Montrer les trois procès, faire un film dans un huis clos judiciaire, ça m’aurait semblé pesant, plombant, très ennuyeux. Ce qui compte pour moi, c’est Agnès, sa disparition. En fait, le cœur de cette histoire, c’est le mystère de cette disparition. Je voulais donner un corps, une voix à Agnès. Pour moi, c’était très important. Je pensais que si elle était présente le plus longtemps possible dans le film, le deuil et l’absence seraient plus forts. Elle existerait par son absence. J’avais envie de voir Agnès vivante. Je pense que ça donne plus de force dramatique au procès lui-même. Bizarrement, il n’y a que sa voix qui est restée, sur les bandes magnétiques. Ça me paraissait très cinématographique : entendre la voix mais en même, avoir l’image du corps. C’est un facteur émotionnel.
Au-delà du personnage incarné par Catherine Deneuve, qu’est-ce qui vous fascine depuis tant d’années chez elle ?
Difficile à dire, car c’est irrationnel. Je ne suis pas un théoricien, je suis instinctif. Catherine me fascine, car c’est un sphinx que j’interroge. On a fait sept films ensemble mais pour moi, elle reste toujours aussi insaisissable. Si j’arrive à atteindre une sorte de plafond avec elle, notre relation de travail s’arrêtera. Ce n’est pas le cas. Et j’ai le sentiment qu’elle n’a pas perdu la grâce de la débutante. Quand je dis ‘moteur’ et que je vois Catherine Deneuve jouer, je me fais beaucoup de soucis car je me demande si elle va arriver au bout de la prise tant elle est fragile. Elle n’a pas des automatismes de métier. Elle n’est pas du tout protégée par la carapace du savoir-faire. Elle est toujours sur le point de déraper. C’est pour ça que je fais beaucoup de prises avec elle. Peu à peu, elle trouve son espace de liberté mais elle garde ce frémissement qui me fascine car je sais que je vais à chaque fois découvrir quelque chose de différent. Catherine, c’est une espèce de funambule, qui prend des risques à chaque instant. C’est une artiste qui travaille dans le moment. Elle ne prépare pas, ne construit pas son personnage. Mais dans l’instant de la prise, elle fait un travail considérable, où elle s’expose, se met en danger. Parfois même, elle ne connaît pas son texte – il faut dire qu’il m’arrive de le changer au dernier moment – pour garder plus de liberté. C’est au fur et à mesure des prises qu’elle prend de l’assurance et de l’aisance. Sur ce film-ci, c’est la première fois dans notre travail qu’elle joue un personnage de femme très solide, une vraie dure, méchante, acharnée, qui veut la tête d’Agnelet.
Pour vous, Agnelet est coupable ou non coupable ?
Mon film n’est pas un polar à la Agatha Christie. Il ne s’agit pas pour moi de savoir qui a tué Agnès Le Roux, si Agnelet est coupable ou non. Ce qui m’a intéressé, c’est la puissance du doute. Des titres de films de Hitchcock marchent très bien pour Agnelet : «Soupçons» ou «L’ombre d’un dou te». Durant tout le film, on se demande ce qu’il a dans la tête. Je voulais donner une chance humaine à ce personnage tragique. Mais pas forcément le rendre sympathique. Il a des aspects pervers, sadiques, manipulateurs. Je ne voulais ni le diaboliser ni lui trouver des excuses. Qu’est-ce qui se cache derrière ce côté Don Juan, bourreau des cœurs ? Il y a un vertige, on ne sait pas trop ce qu’il cache.
Au fur et à mesure de vos films, vous avez l’impression d’en apprendre plus sur la nature humaine ?
En tout cas, elle ne cesse de me surprendre, de m’étonner, d’exciter ma curiosité. Si on perd cette curiosité, je ne vois pas comment on peut faire du cinéma.
mercredi 23 juillet 2014
André Téchiné / Catherine Deneuve me fascine, car c'est un sphinx
André Téchiné :
«Catherine Deneuve me fascine, car c'est un sphinx»
Dans un entretien au sujet de son dernier film, L'homme qu'on aimait trop, le réalisateur français explique sa fascination pour son actrice fétiche, au casting de sept de ses longs-métrages.
Le Figaro
Por Claire Rodineau
Publié
Insaisissable Catherine Deneuve. Dans une interview au journal belge Le Soir , le réalisateur André Téchinée xplique la longévité de sa relation avec l'actrice, présente dans sept de ses films dont L'Homme qu'on aimait trop, actuellement en salle. Deneuve y incarne Renée Le Roux, veuve d'un riche homme d'affaires et mère d'Agnès Le Roux (Adele Haenel), disparue sans laisser de traces en 1977.
La recette du succès de ce duo prolifique? Plus de trente ans après leur première collaboration en 1981 sur Hôtel des Amériques, la grande Catherine, qu'André Téchiné à découverte dans les films de Demy et de Buñuel, demeure une énigme insondable aux yeux du réalisateur. «Catherine me fascine, car c'est un sphinx que j'interroge. On a fait sept films ensemble mais pour moi, elle reste toujours aussi insaisissable» déclare-t-il.
Dans L'Homme qu'on aimait trop, deuxième adaptation d'un fait divers pour Téchiné après La Fille du RER, déjà avec Catherine Deneuve, l'actrice incarne une femme forte, à la tête d'un empire florissant, mais déchirée par les doutes devant l'attitude ambivalente de Maurice Agnelet. Un rôle de femme à poigne qu'elle porte avec brio: «Sur ce film-ci, c'est la première fois, dans notre travail, qu'elle joue un personnage de femme très solide, une vraie dure, méchante, acharnée, qui veut la tête d'Agnelet.»
Comme dans chacune de leurs collaborations, du Lieu du crime aux Voleurs, en passant par Ma saison préférée, le réalisateur pousse l'actrice dans ses retranchements, faisant de chaque tournage un nouveau défi: «Quand je dis “moteur” et que je vois Catherine Deneuve jouer, je me fais beaucoup de souci, car je me demande si elle va arriver au bout de la prise tant elle est fragile. Elle n'a pas des automatismes de métier. Elle n'est pas du tout protégée par la carapace du savoir-faire. Elle est toujours sur le point de déraper».
Pour le réalisateur, malgré ses 52 années de carrière, Catherine Deneuve a su garder la «grâce du débutant». «C'est une artiste qui travaille dans le moment. Elle ne prépare pas, ne construit pas son personnage. Mais dans l'instant de la prise, elle fait un travail considérable, où elle s'expose, se met en danger. Parfois même, elle ne connaît pas son texte - il faut dire qu'il m'arrive de le changer au dernier moment - pour garder plus de liberté. C'est au fur et à mesure des prises qu'elle prend de l'assurance et de l'aisance» assure le réalisateur.
Cette collaboration réussie entre les deux monstres sacrés, nés la même année et qui s'appellent «frère» et «sœur de cinéma», ne semble pas près de s'arrêter. «Si j'arrive à atteindre une sorte de plafond avec elle, notre relation de travail s'arrêtera. Ce n'est pas le cas», a encore confié Téchiné.
lundi 21 juillet 2014
Cinq morts dans un hôpital bombardé à Gaza
Cinq morts dans un hôpital bombardé à Gaza
- Par Lefigaro.fr avec AFP
- Mis à jour
- Publié
Cinq personnes ont été tuées aujourd'hui par une frappe israélienne qui a touché un hôpital du centre de la bande de Gaza, selon les secours palestiniens.
Le troisième étage de l'hôpital des Martyrs d'Al-Aqsa à Deir el-Balah a été visé, selon Achraf al-Qoudra, porte-parole des services de secours palestiniens dans l'enclave, qui avait fait état de 15 blessés dans un premier bilan.
LE FIGARO
dimanche 20 juillet 2014
samedi 19 juillet 2014
jeudi 17 juillet 2014
Jacques Prévert / Pour toi mon amour
Jacques Prévert
Jacques Prévert / Para ti mi amor (De otros mundos)
For you my love by Jacques Prévert (Kiss)
Jacques Prévert / Para ti meu amor (Pessoa)
For you my love by Jacques Prévert (Kiss)
Jacques Prévert / Para ti meu amor (Pessoa)
Je suis alle au marche aux oiseaux
Et j'ai achete des oiseaux
Pour toi
mon amour
Je suis alle au marche aux fleurs
Et j'ai achete des fleurs
Pour toi
mon amour
Je suis alle au marche a la ferraille
Et j'ai achete des chaines
De lourdes chaines
Pour toi
mon amour
Et puis je suis alle au marche aux esclaves
Et je t'ai cherchee
Mais je ne t'ai pas trouvee
mon amour
mercredi 16 juillet 2014
Jacques Prévert / Cet amour
Jacques Prévert
Cet amour
Cet amour
Si violent
Si fragile
Si tendre
Si désespéré
Cet amour
Beau comme le jour
Et mauvais comme le temps
Quand le temps est mauvais
Cet amour si vrai
Cet amour si beau
Si heureux
Si joyeux
Et si dérisoire
Tremblant de peur comme un enfant dans le noir
Et si sûr de lui
Comme un homme tranquille au milieu de la nuit
Cet amour qui faisait peur aux autres
Qui les faisait parler
Qui les faisait blémir
Cet amour guetté
Parce que nous le guettions
Traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Parce que nous l'avons traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Cet amour tout entier
Si vivant encore
Et tout ensoleillé
C'est le tien
C'est le mien
Celui qui a été
Cette chose toujours nouvelles
Et qui n'a pas changé
Aussi vraie qu'une plante
Aussi tremblante qu'un oiseau
Aussi chaude aussi vivante que l'été
Nous pouvons tous les deux
Aller et revenir
Nous pouvons oublier
Et puis nous rendormir
Nous réveiller souffrir vieillir
Nous endormir encore
Rêver à la mort
Nous éveiller sourire et rire
Et rajeunir
Notre amour reste là
Têtu comme une bourrique
Vivant comme le désir
Cruel comme la mémoire
Bête comme les regrets
Tendre comme le souvenir
Froid comme le marbre
Beau comme le jour
Fragile comme un enfant
Il nous regarde en souriant
Et il nous parle sans rien dire
Et moi j'écoute en tremblant
Et je crie
Je crie pour toi
Je crie pour moi
Je te supplie
Pour toi pour moi et pour tous ceux qui s'aiment
Et qui se sont aimés
Oui je lui crie
Pour toi pour moi et pour tous les autres
Que je ne connais pas
Reste là
Là où tu es
Là où tu étais autrefois
Reste là
Ne bouge pas
Ne t'en va pas
Nous qui sommes aimés
Nous t'avons oublié
Toi ne nous oublie pas
Nous n'avions que toi sur la terre
Ne nous laisse pas devenir froids
Beaucoup plus loin toujours
Et n'importe où
Donne-nous signe de vie
Beaucoup plus tard au coin d'un bois
Dans la forêt de la mémoire
Surgis soudain
Tends-nous la main
Et sauve-nous.
mardi 15 juillet 2014
Nana Mouskouri sur la scène de l'Acropole à 80 ans
Nana Mouskouri
sur la scène de l'Acropole
à 80 ans
La star de la chanson grecque a célébré lundi soir son anniversaire en musique à Athènes, précisément à l'endroit où elle avait, en 2008, fait des adieux qui l'ont rendue malade et convaincue de repartir en tournée.
Le Figaro
Publié le 15/07/2014 à 07:34
«Je veux être claire: il y a six ans, au théâtre de l'Odéon d'Herodes Atticus, il s'agissait d'adieux. C'était une époque où je me sentais vieillir, où le monde auquel j'appartenais avait disparu (...) Mais ça m'a coûté beaucoup», a confié ce week-end au quotidien Kathimerini l'icône aux inamovibles montures de lunettes noires. Dans deux longs entretiens avec la presse grecque, Nana Mouskouri, née en 1934 à La Canée (Crète, sud), a laissé transparaître failles, mélancolie et même colères tranchant avec son profil marmoréen. «Sentiment de désespoir, d'inutilité»: son retrait de la scène après 50 ans de carrière sur tous les continents l'a non seulement «déprimée», mais rendue malade: «j'étais tous les jours chez le médecin (...) mon corps renâclait, mon dos me faisait mal».
Jusqu'à la décision de repartir en tournée à l'occasion de ses 80 ans, en octobre. La tournée «Joyeux anniversaire» a débuté fin 2013 en Amérique du Sud, est passée par Paris, le Canada au printemps et une vingtaine de dates sont prévues jusqu'en janvier 2015, en France, Angleterre, Allemagne notamment. Le concert de lundi soir dans le spectaculaire théâtre antique situé au pied de l'Acropole etait sa seule date de l'été. Nana Mouskouri, qui a collaboré avec le compositeur français Michel Legrand et l'Américain Quincy Jones, est montée sur scène en compagnie de sa fille Lenou pour revisiter son répertoire composé de chansons grecques, d'airs classiques, de jazz et de variété.
Faire connaître la Grèce au monde
Nana Mouskouri, 350 millions de disques écoulés au compteur, a fait ses premières armes au Conservatoire d'Athènes en chant classique et harmonie. Essentiellement connue à l'étranger pour son répertoire de variété légère interprété sur une tonalité cristalline, la chanteuse a débuté dans les années 50 dans un registre de chansons beaucoup plus littéraires, interprétant notamment les poètes grecs mis en musique par Manos Hadjidakis dont elle fut l'une des voix favorites. Un pedigree qu'elle a longuement rappelé dans ses interviews face à ceux qui lui reprocheraient d'avoir «folklorisé» la chanson grecque: «Je ne suis pas une carte postale», a-t-elle assuré dans Vima, «la seule chose que j'ai toujours voulu était de faire connaître la Grèce au monde».
lundi 14 juillet 2014
Laurent Fièvre / Un regard vertigineux
Venus 02 Laurent Fièvre |
Laurent Fièvre
Un regard vertigineux
Par Nicolas Liau
Pénétrer dans l'imaginaire de Laurent Fièvre, c'est risquer un regard vertigineux à travers un miroir sans tain dont le fond n'est plus tapissé que par un savant amalgame de larmes, de bile et de lymphe. Cette boue foisonnante est le terreau d'où se lèvent nos cauchemars les plus tenaces, les plus redoutés aussi parce qu'ils nous cueillent tout éveillés. C'est la lie de hontes, de névroses et de hantises qui, heure par heure, siècle après siècle, se dépose au tréfonds de notre humanité. L'artiste en a fait la nuance maîtresse de sa palette.
Comme échappés d’une vaste léproserie devenue atelier prolifique, les créatures décharnées conçues par le peintre ont pour cordon ombilical une longue et même chaîne de désassemblage. Retranchée et divisée, la matière humaine trouve dans les mutilations diverses le souffle de la recréation. L'artiste se fait bâtisseur de monstres, par démolitions. Mais s'il démolit, c'est à la pointe du burin. Car graver l'émotion dans le marbre des chairs suppose autant de patience que de minutie.
A la frontière du grotesque et du sublime, l'œuvre traumatique de Laurent Fièvre convoque cette part du beau sertie en secret dans le laid pour dessiner une esthétique du manque et du dépouillement. Si la ménagerie boiteuse et bringuebalante dont il est le géniteur réveille en nous ce fascinant haut-le-cœur, c'est que les contours accidentés de tous ces pauvres hères sont calqués sur les nôtres : l'horreur clinique exhibée sur la toile et le papier, comme au centre d'un amphithéâtre de dissection, est bel et bien l'expression de nos infirmités intérieures.
De l'humidité fœtale jusqu'à l'aridité cadavérique, le peintre fouille chacune des strates de l'existence pour laisser affleurer tous les maux qui fossilisent notre monde, notre vie en communauté. A la manière d'une figure de style, chaque amputation des corps sert une rhétorique de la souffrance universelle. Aveugles, muets et sourds, les suppliciés de Laurent Fièvre ne nous assaillent pas moins de cris et de regards qui disent le désespoir et viennent mordre nos âmes. Ombres d'eux-mêmes, et de nous-mêmes, ils déroulent à travers leur nudité dupliquée le nuancier brut des sentiments noirs. Car, bien que d'une blancheur calcaire, comme lapidifiée, leur peau dissimule les nerfs d’une sensibilité intacte, voire accrue. Crucifiée sous la torture du fer et du sang, leur chair finit par avouer, dans ses béances et ses moignons, dans les épanchements des fluides organiques, tous les non-dits qui musellent notre société.
Anonyme et asexuée, appelant à elle tout ce que la langue française compte de préfixes privatifs, la parade de corps ankylosés que l'artiste assemble de toile en toile ne saurait se réduire au seul message social qui la traverse, à une simple visée didactique ou, pire, à des exercices de style d'un sadisme morbide. Elle est surtout l'incarnation d'un authentique désir de créer, de célébrer la richesse des sensations et sentiments humains; le besoin de poser sur la fragilité, la vanité de l'homme un regard tendre et miséricordieux.