jeudi 4 février 2016

Patricio Guzmán / Le Bouton de nacre




Tribus indigènes de Patagonie.
Musée du Quai Branly - Scala Florence


Depuis son expatriation (à Cuba, en Espagne, puis en France), consécutive au coup d’Etat d’Augusto Pinochet en 1973, le Chilien Patricio Guzmán n’a eu de cesse de documenter l’histoire contemporaine de son pays. La trilogie La Bataille du Chili (1974-1979), réalisée avec la participation de Chris Marker, Le Cas Pinochet (2001) ou Salvador Allende (2004), est constituée de titres de films qui parleront aux cinéphiles, mais aussi à tous ceux qui portent un intérêt à l’Amérique latine ainsi qu’aux dictatures sanglantes mises en œuvre sur ce continent durant la guerre froide.

Pour Guzmán lui-même, cet inlassable accaparement par l’histoire de son pays était aussi, sans doute, une manière pour l’exilé de revenir par procuration dans le cours d’une histoire, tout à la fois intime et nationale, dont il avait été violemment arraché.

Esprit de l'exil


Qui pourra jamais dire, à moins de l’avoir vécu dans sa chair, ce qu’est ce sentiment de l’exil ? Cet arrachement brutal à soi-même, cette lancinante souffrance de ne plus pouvoir habiter le monde auquel on était destiné, cette habitude à prendre de vivre perpétuellement ailleurs que chez soi. Cette rupture peut pourtant dévoiler une face solaire : la mise à distance du nationalisme, la découverte du monde et de soi-même comme altérité, la célébration plurivoque et universelle de la vie. Si l’on s’en tient à ce que montre son cinéma, on émettra l’hypothèse que Patricio Guzmán est entré depuis peu dans cette phase solaire, douce, pacifiée de l’existence diasporique. Que l’esprit de l’exil le tenaille moins qu’il ne l’inspire, lui insufflant une manière différente de regarder le monde.




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