mardi 23 juillet 2019

Rencontre Andrea Camilleri, conteur hors pair de la Sicile


Andrea Camilleri

RENCONTRE Andrea Camilleri, 

conteur hors pair de la Sicile




  • LEBEDEL Pierre
  • le 15/04/1999 à 00:00 



  • Andrea Camilleri, ami de Leonardo Sciascia, a été découvert par le romancier français Serge Quadruppani, qui est devenu en même temps son traducteur. Cet écrivain sicilien, dont trois romans figurent parmi les six premiers au box-office du quotidien La Repubblica, a attendu l'âge de 57 ans pour écrire. « Je faisais trop de cinéma, de télévision et de radio. J'étais trop pris par ce métier et, pour bien l'exercer, il fallait s'y donner complètement », précise-t-il.
    Alors, un beau jour, il nous a entraînés dans une ville imaginaire, Vigata, pas trop éloignée de Palerme, avec un héros : le commissaire Montalbano, dont le nom est un clin d'oeil discret à l'écrivain catalan Vasquez Montalban. Avec stupéfaction, il s'est aperçu que son personnage avait un homonyme bien réel en la personne d'un policier, Salverio Montalbano, qui a mené des opérations contre la Mafia. « Lorsque les journalistes interrogeaient ce dernier, raconte Andrea Camilleri, il se mettait en colère et répondait : j'ai deux enfants et pas de droits d'auteur. » Et Camilleri de rétorquer : « Mais vous avez la reconnaissance de tous les Italiens pour ce tout ce que vous avez fait. »
    A travers deux de ses romans, La Forme de l'eau et Chien de faïences (1), il dresse un réquisitoire sévère contre la politique menée à l'égard de la Mafia, reprochant aux Américains d'avoir joué la carte de la « Pieuvre » entre 1942 et 1944, et d'avoir placé des hommes à elle dans 56 municipalités sur 68 dans la région de Palerme, détruisant par là même toutes les forces novatrices siciliennes. Il n'empêche que son héros ne s'en laisse pas compter. S'il glisse _ non sans humour _ sur les petits délits, il est sans pitié pour les truands de haut vol.
    Dans son troisième roman, L'Opéra de Vigata (2), il nous plonge dans le Vigata de la fin du XIXe siècle. Un préfet venu du nord de l'Italie veut imposer à la population la représentation d'un obscur opéra : Le Brasseur de Preston. Cela commence doucement puis, peu à peu, les passions se déchaînent. Heureusement que le délégué Puglisi _ qui pourrait être l'arrière-grand-père du commissaire Montalbano _, qui connaît admirablement sa ville et ses habitants, peut mettre fin au scandale.
    Comme l'écrit à juste titre Serge Quadruppani : « Andrea Camilleri est un conteur hors pair... qui restitue les saveurs fortes d'une terre, la Sicile. » En attendant, il travaille à un nouveau roman mettant en scène un autre policier dans le Royaume de Naples et des deux Siciles, en 1734. Réjouissons-nous d'avance.
    Pierre LEBEDEL
    (1) La Forme de l'eau, Fleuve noir, 224 p., 52 F et Chien de faïences, Fleuve noir, 228 p., 52 F.
    (2) L'Opéra de Vigata, Métaillé, 228 p., 100 F.
    Les trois romans sont superbement traduits par Serge Quadruppani.




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