Le jeu de la dame: Anya Taylor-Joy, portrait d’un phénomène aux multiples visages
PORTRAIT - La carrière de la charismatique comédienne de 24 ans, qui tient le rôle phare d’une des séries les plus regardées actuellement sur Netflix, prend une nouvelle dimension.
Par Damien Mercereau
Mis à jour le 16/11/2020 à 15:35
Publié le 16/11/2020 à 15:35
Depuis le 23 octobre 2020, les abonnés de Netflix ont succombé au Jeu de la dame (The Queen's Gambit), minisérie adaptée du livre de Walter Tevis sorti en 1983. Un an avant de mourir d'un cancer du poumon, cet écrivain américain à qui l'on doit La couleur de l'argent et L'arnaqueur explore un jeu qui le passionne, celui des échecs. Il retrace le parcours chaotique d'un jeune prodige névrosé, de son apprentissage dans un orphelinat auprès d’un vieux concierge solitaire jusqu'à la reconnaissance planétaire. Au travers de son personnage de Beth Harmon, il explore le thème de la dépendance aux médicaments et à l'alcool comme celui de la place de la femme dans la société dans les années 1960.
Walter Tevis avait-il imaginé son personnage sous les traits angéliques et le grand regard énigmatique du visage d'Anya Taylor-Joy? Sur la couverture de la première édition de The Queen's Gambit, Beth Harmon était représentée vêtue de rouge avec une longue chevelure brune. Pour la comédienne de 24 ans comme pour le créateur de la série, Scott Frank, après la lecture du roman, il ne faisait aucun doute qu'elle devait être rousse. «Je me suis sentie possédée par ce personnage. J'ai dévoré le livre en une heure avant même de découvrir le script et j'ai tout de suite compris comment elle devait être», explique-t-elle.
Blonde dans The Witch, chauve dans Atlantis, brune dans Split puis dans Le secret des Marrowbone, châtain clair dans Peaky Blinders et de nouveau blonde dans Emma puis dans Les nouveaux mutants, Anya Taylor-Joy est un caméléon ultra-charismatique qui enchaîne les rôles depuis cinq ans. «J'avais même teint mes cheveux en rose et je les avais fait couper très court lorsque j'avais 18 ans», se souvient-elle auprès de Vanity Fair . Cette carrière de comédienne au succès exponentiel, elle la doit à une rencontre inopinée dans une rue new-yorkaise. Alors qu’elle promenait son chien chaussée de talons hauts pour s’entraîner à marcher en vue d’une soirée, elle se fait remarquer par la femme d'affaires Sarah Doukas qui la recrute, à 17 ans, dans son agence de mannequin. Cette nouvelle expérience professionnelle lui ouvre indirectement les portes de la comédie grâce à une autre rencontre, avec l'acteur irlandais Allen Leech, sur le tournage de Downton Abbey. Elle passe sa première audition pour le rôle de Maléfique jeune dans le film Maléfique avec Angélina Jolie mais se voit préférer la Britannique Ella Purnell. «J'ai beaucoup pleuré lorsqu'on m'a refusé le rôle», se souvient-elle.
Née à Miami, en Floride, en avril 1996 d'une mère photographe et décoratrice d'intérieur d'origine africaine, espagnole et anglaise, et d'un père banquier international d'origine écossaise et argentine, elle grandit «dans la nature et la poussière» en Argentine jusqu'à ses 6 ans. Ses parents quittent le pays sud-américain pour vivre dans un environnement plus stable et décident de s'installer à Londres. Là-bas, la cadette de cette famille nombreuse de six enfants met du temps à faire le deuil de son ancienne vie. «J'étais têtue, je voulais rentrer chez moi, je ne comprenais rien de Londres», déclarait en 2017 à Marie-Claire celle qui n'a consenti à apprendre l'anglais qu'à partir de ses 8 ans. «J'étais persuadée qu'en ne parlant qu'espagnol en Angleterre, j'allais pouvoir rentrer chez moi. Cela n'a pas fonctionné...» Victime de harcèlement scolaire, Anya Taylor-Joy tourne rapidement le dos aux écoles londoniennes à l'âge de 14 ans et part s'installer à New York pour suivre des cours de comédie jusqu'à ses 16 ans.
À défaut d'avoir intégré le casting de Maléfique, celle qui croit aux signes du destin décroche son premier rôle - et même LE premier rôle - en 2015 dans le film d'horreur The Witch de Robert Eggers puis poursuit en 2016 dans Morgane de Luke Scott, Barry de Vikram Gandhi, Split de Night Shyamalan (et la suite, Glass, en 2018), Pur-sang de Cory Finley avec Olivia Cooke et plus récemment Emma d'Autumn de Wilde et Les nouveaux mutants de Josh Boone. À 21 ans, elle est récompensée du Trophée Chopard de la révélation féminine au Festival de Cannes 2017 et succède au palmarès à des comédiennes comme Audrey Tautou, Ludivine Sagnier, Diane Kruger, Marion Cotillard, Léa Seydoux, Shailene Woodley ou encore Adèle Exarchopoulos. À la télévision, elle joue dans les séries Miniaturiste en 2017, Peaky Blinders en 2019 et Le jeu de la dame en 2020. Avant de tenir le rôle de Beth Herman la création de Netflix, Anya Taylor-Joy ne connaissait quasiment rien de la pratique des échecs et a pu compter sur l'apprentissage de grands spécialistes de la discipline. «Ce n'est pas un jeu que l'on peut maîtriser du jour au lendemain», confit-elle à Entertainment Weekly. «C'est impossible de mémoriser toutes les séquences sans devenir fou! J'apprenais mes matchs quelques minutes avant comme une chorégraphie que j'exécutais avec mes doigts», ajoute celle qui a pratiqué intensivement la danse de ballet durant ses années à Londres. La suite? La jeune femme tourne actuellement le film The Northman avec Nicole Kidman et Alexander Skarsgard et tiendra le rôle de Furiosa dans le préquel du film Mad Max Fury Road aux côtés de Chris Hemsworth.
Passionnée de musique et d’écriture, Anya Taylor-Joy compose, guitare à la main, et s’adonne à la création de quelques poèmes. Des occupations supplémentaires pour cette insomniaque chronique à la vue défectueuse toujours curieuse de nouvelles expériences. «J'adorerais faire quelque chose de grand pour les animaux», assurait-elle il y a quatre ans à Interview Magazine . «J'aime vraiment les animaux. La seule chose qui me rende vraiment dingue est la maltraitance d'un animal. Je vois du rouge complet.» Quant à sa vie sentimentale, celle qui, plus jeune, fantasmait sur le comédien Jeremy Sumpter (notamment dans l’adaptation de Peter Pan réalisée en 2003 par P. J. Hogan qu’elle a vu et revu) aurait été proche de l'acteur irlandais Eoin Macken puis du photographe Ben Seed. Des histoires qu’elle protège secrètement.
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