Patti Smith |
DANS LES PAS DE PATTI SMITH
17 juillet 2019 à 20:36
Le metteur en scène Benoît Bradel a adapté un récit de Claudine Galéa, une vision rêvée de l’icône de «Horses» à travers les yeux d’une adolescente.
C’est une performance et un concert, le portrait d’une femme qui raconte comment Patti Smith lui a sauvé la vie, jouée en alternance par Marie-Sophie Ferdane et Marina Keltchewsky, et ce soir-là, c’est Marie-Sophie Ferdane qui est sur le plateau, jeans noirs, micro en main. Comme dans Outside vu le même jour, il s’agit de montrer une artiste par les yeux d’un autre, jusqu’à ce que l’alchimie des deux corps advienne, et tout d’un coup, sans aucune imitation, la pulsation, l’énergie, les gestes de Patti Smith surgissent, d’abord brièvement, puis de plus en plus souvent. Le spectacle, adapté d’un récit de Claudine Galéa, est à la fois une évocation de la carrière heurtée de la chanteuse poétesse adulée et le récit de la découverte de l’homosexualité d’une jeune fille, quand la liberté et la révélation arrivent par la musique, débordent et élargissent l’avenir, tout d’un coup le ciel est visible, «elle m’était entrée dans le corps, à l’endroit exact où le corps est tout, les sens, les émotions, l’intelligence».
Marie-Sophie Ferdane, blondeur oxygénée qui rappelle celle de Blondie, n’a besoin d’aucun accessoire pour passer de la jeune fille revêche, timide et fière comme savent l’être les ados, à la star, à peine retire-t-elle son chemisier pour un marcel blanc, la fusion se fait avec fluidité. Portée par les guitaristes Thomas Fernier et Seb Martel, la comédienne plonge dans le matériel sonore, l’air se fait aquatique, elle danse comme on crawle dans le dispositif simple qu’a conçu le metteur en scène Benoît Bradel. Le spectacle n’est pas toujours exempt de facilités, notamment dans l’adresse au public, quand les musiciens lui font compléter les patronymes de certains prénoms, mais il est exaltant, comme l’est l’émerveillement de la jeune fille.
On croise Marie-Sophie Ferdane qui sort tout juste de la cour d’honneur où elle jouait dans Architecture, de Pascal Rambert, et qui se demande quelle est la différence entre être devant deux mille personnes ou quatre-vingt-quatre. La comédienne répond d’elle-même : « Aucune, ça nécessite le même élan .» Elle dit qu’elle peut être Patti Smith, parce qu’il s’agit d’une Patti rêvée à travers les yeux d’une autre, que sinon ça l’inhiberait complètement, et que jouer en musique déplace la psychologie vers « une transe, un flux ». C’est un spectacle qui peut se glisser partout, il s’est déjà joué aussi bien dans une église qu’à l’Opéra de Rennes, et il est question d’inviter la vraie Patti Smith. Marie-Sophie Ferdane ne demande qu’une seule chose : ne pas le savoir si jamais, un soir, elle est dans la salle.
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