Grands films de fin du monde (3/5): omelette aux truffes dans «Les Derniers Jours du monde»
Le coronavirus propage un parfum de fin des temps. Un thème que le cinéma vénère. Dans «Les Derniers Jours du monde», les frères Larrieu rappellent que l’effondrement ultime n’abolit pas nécessairement l’épicurisme. Le plus sensuel des films apocalyptiques
Antoine Duplan
Publié mercredi 22 avril 2020 à 16:57
Modifié jeudi 23 avril 2020 à 11:27
Les films catastrophes hollywoodiens font croire que l’effondrement sera aussi brutal que celui du World Trade Center. Or il peut être insidieux et progressif comme le réchauffement climatique, ressembler à cette «espèce de menace diffuse, de dérèglement possible et peut-être total» que rapportent Arnaud et Jean-Marie Larrieu dans Les Derniers Jours du monde. Quelques cendres qui flottent dans l’air, une pénurie de papier à la papeterie de Biarritz, des équipes de désinfection dans les rues, des bulletins d’informations contradictoires à la radio… Ces dissonances s’avèrent subtilement inquiétantes.
Robinson (Mathieu Amalric) prend les chemins de l’exode dans un monde inintelligible qui se désagrège. Le sentiment de perdition est palpable. Mais la vie conserve ses droits. L’errant s’envoie en l’air avec Ombeline (Catherine Frot), une libraire de rencontre, et avec son ex-femme aussi (Karin Viard). En compagnie de Laetitia, dans une auberge de campagne périgourdine, il cuisine une omelette aux truffes arrosée d’un grand bordeaux, puis s’adonne à la sieste canaille.
D’humeur eschatologique, les Larrieu n’abjurent pas pour autant l’hédonisme. Au bord de l’abîme, leurs personnages vont à l’opéra, boivent et baisent. Rabelaisien, le film est une ode à la sensualité. «Il n’y a pas d’Apocalypse au sens religieux», dit Arnaud. «On s’enfonce dans un passé primitif, païen, renchérit Jean-Marie. Il y a un château médiéval, les animaux ressurgissent. Le père couche avec la fille, mais l’inceste n’était pas tabou dans certaines civilisations.» Au final, courant nus dans Paris comme au matin du monde, Robinson et Laetitia renouent avec les origines de l’humanité. Ultimes Adam et Eve, ils invoquent les pulsions premières de l’amour et du désir. Juste avant l’éclair blanc qui paraphe la fin de l’humanité, Léo Ferré chante cette java gouailleuse qu’est Jolie Môme, comme un doigt d’honneur à la certitude de l’extinction. «Notre apocalypse réveille des forces vives», revendiquent les frangins.
D’humeur eschatologique, les Larrieu n’abjurent pas pour autant l’hédonisme. Au bord de l’abîme, leurs personnages vont à l’opéra, boivent et baisent. Rabelaisien, le film est une ode à la sensualité. «Il n’y a pas d’Apocalypse au sens religieux», dit Arnaud. «On s’enfonce dans un passé primitif, païen, renchérit Jean-Marie. Il y a un château médiéval, les animaux ressurgissent. Le père couche avec la fille, mais l’inceste n’était pas tabou dans certaines civilisations.» Au final, courant nus dans Paris comme au matin du monde, Robinson et Laetitia renouent avec les origines de l’humanité. Ultimes Adam et Eve, ils invoquent les pulsions premières de l’amour et du désir. Juste avant l’éclair blanc qui paraphe la fin de l’humanité, Léo Ferré chante cette java gouailleuse qu’est Jolie Môme, comme un doigt d’honneur à la certitude de l’extinction. «Notre apocalypse réveille des forces vives», revendiquent les frangins.
Les Derniers Jours du monde, d’Arnaud et Jean-Marie Larrieu (2009), avec Mathieu Amalric, Catherine Frot, Karin Viard, 2h10.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire