Valérie Trierweiler à l'Elysée, le 30 novembre 2013. |
VALÉRIE TRIERWEILER
"MA VIE AVEC FRANÇOIS"
Notre journaliste Catherine Schwaab a lu en avant-première «Merci pour ce moment» (aux éditions Les Arènes), le livre choc de Valérie Trierweiler sur l’histoire de sa passion avec le président de la République François Hollande.
Par CATHERINE SCHWAAB
Paris Match
Le 03 septembre 2014 | Mise à jour le 11 septembre 2014
«Alors c’est vrai ? » Voilà comment Valérie a affronté la trahison. Assise sur le lit conjugal, dans les appartements privés de l’Elysée, le 9 janvier 2014, à 15 heures. Le regard errant machinalement à travers les hautes fenêtres de la chambre, elle ne réalise pas encore clairement qu’elle ne reverra plus les érables, les sycomores, les marronniers et les tilleuls du parc magnifique qui se déploie, impavide, dans la froideur grise de cet hiver funeste. Le plus horrible moment de sa vie. Une heure auparavant, elle tenait encore son rôle de première dame dans la crèche de l’Elysée. L’établissement a dû en voir passer, des premières dames, en vingt-neuf ans d’existence. Valérie commençait à « intégrer la fonction », comme elle le confiait ; et elle souhaitait, pour ses 30 ans, lui donner un nom, à ce jardin d’enfants : « Danielle Mitterrand ». D’un seul coup, tout s’écroule. Elle regarde François, « son » François.
Son intime compagnon : un mari adultère ! Elle regarde ce couple qu’ils forment depuis neuf ans, chacun à présent posé sur le lit, du côté où ils ont l’habitude de dormir. Elle est tétanisée par la nouvelle, confirmée, de la publication de « Closer » qui va révéler demain les photos d’un amoureux casqué, à Vespa. Son amoureux à elle. Son président, celui dont elle n’aurait « jamais imaginé » qu’il puisse la tromper. Depuis un an, elle balayait la rumeur. Quelques semaines plus tôt, elle avait eu un doute. « Tu as quelque chose à te reprocher ? » L’ambiance s’était tellement dégradée entre eux. Il l’avait rassurée. A présent, François Hollande fuit son regard. Au fil des heures, il se montre abattu. Elle, beaucoup plus combative. Pourtant... « Mon sort est scellé, mais je ne le sais pas encore », écrira-t-elle six mois plus tard, gladiatrice vaincue. Mais là, sur le moment, pas question pour elle de laisser exploser son couple. Vaillante « épouse » non officielle, Valérie ne mesure pas encore à quel point François s’est éloigné.
VALÉRIE A VU FRANÇOIS CHANGER. SE BLINDER SANS ÉTATS D'ÂME
Il lui faudra cinq à six mois pour réaliser. Remettre en perspective toutes ces années de romance, de lutte et de dégringolade.De fait, c’est une étrange alchimie qui a, inexorablement, métamorphosé leur relation depuis qu’il a annoncé sa candidature à la présidence. Elle a vu François changer. Se blinder sans états d’âme. Saisi d’une fièvre guerrière, il perd peu à peu sa fougue amoureuse, « cette passion insouciante, ces heures où tout semblait facile, où l’air était léger... ». Plus ses victoires politiques s’enchaînaient, et moins il a semblé vouloir les partager avec Valérie.
Un clan serré de conseillers, de mâles ambitieux a commencé à enserrer le candidat. Stéphane Le Foll assène un jour à Valérie pendant la campagne : « Si tu veux une soirée avec François, il faut que tu passes par moi. » Mortifiée. Elle a beau s’imposer contre ces coqs, Valérie la jalouse, la possessive, doit moult fois avaler son chapeau. D’abord, il y a Ségolène. Celle qu’elle a détestée et qu’elle redoute. La mère des quatre enfants qui ne l’aiment pas, ne veulent rencontrer leur père que seul. Ségolène la madone transfigurée par un impeccable relooking, alors que Valérie se voit prendre un coup de vieux, sous le coup des tensions. Ségolène draine la lumière depuis que Mitterrand l’a nommée ministre au détriment de François, sous prétexte qu’il ne veut pas de couple au gouvernement. Un jour, à la garden party du 14 Juillet, un militant a l’outrecuidance d’appeler François : « Monsieur Royal ». Imperturbablement rieur mais bouillonnant à l’intérieur, François grince : « Ça se paiera un jour ! » Vive la paix des ménages ! Ségolène et François, deux fauves politiques travaillant leur attaque... Valérie l’avoue, elle ne fait pas le poids.
Mais avec elle, c’est différent. François vit une passion. Elle a la beauté de son ex, en plus jeune ; la fraîcheur ingénue d’une novice, l’insolence d’une fine observatrice, la distinction hautaine, ce vernis un peu coincé qu’on a envie de faire voler en éclats. Pendant des années, ils se sont tourné autour, se sont rapprochés, éloignés... jusqu’à ce qu’une proche de François lui ouvre les yeux : « Tu ne vois pas qu’il est fou de toi ! » Il est vrai que, comme le décrit Valérie, « un champ électromagnétique s’active entre nous deux lorsque nous sommes en présence l’un de l’autre. Mais je suis aveugle ». Enfin, le 14 avril 2005, il y a « le baiser de Limoges », « notre légende à nous ». Leur histoire est un torrent. Valérie quitte Denis, le père de ses trois enfants encore petits. Un fol amour les emporte. « Nos années enchantées », résume Valérie. Il lui faudra cependant constamment composer avec « l’autre » qui va tout faire pour parasiter leur histoire, jusqu’à annoncer un mariage prochain à Tahiti alors qu’ils sont séparés depuis près de deux ans ! Mensonges et contre-vérités se pratiquent en politique. Mais Valérie n’est pas une politique. Sa haine pour Ségolène n’a d’égale que son insécurité.
Elle évoque sa propre « hystérie » au congrès de Rennes, lorsque les deux ex font enfin cause commune sous les applaudissements. « Je ressens, au sens littéral du terme, cet “excès émotionnel incontrôlable” : il m’est physiquement impossible de les voir tous les deux main dans la main sur scène... Et je suis impuissante devant ce désir collectif de les voir côte à côte. » Dans la loge, Valérie explose, en larmes. François tente de la calmer, en vain. Faut-il se sentir si peu sûre de soi ? Ou perçoit-elle chez François l’art d’un subtil double jeu ? Flairant cette faiblesse, Ségolène ne se gêne pas pour revenir quelques minutes après, euphorique, se faire acclamer sur scène au côté de son ex. « Je touche le fond, anéantie. François et moi, nous ne formerons jamais un couple reconnu. »
UNE SOMME D'INTIMES BLESSURES ET D'HUMILIATIONS QUI RÉVÈLENT UNE FEMME PLUS COMPLEXE QUE CELLE QU'ON A DÉPEINTE
Tout au long des 320 pages de son livre, c’est ce sentiment d’illégitimité qui resurgit. Fragile Valérie. Dès l’accession de Hollande au pouvoir, cet homme qui a tout fait pour la conquérir semble réactiver chez elle des complexes de classe. « Mon voyage social », dit-elle pour poétiser son ambitieuse ascension, comme si elle n’assumait pas cette volonté de s’extraire de son milieu modeste. Certains évoquent l’arrivisme. Mais Valérie n’est pas assez opportuniste, trop intransigeante. Ce sera son talon d’Achille. Aujourd’hui, elle en convient, explique : « Avoir appris, jeune, à combattre l’adversité a déformé ma vision du monde. A voir des adversaires partout, je m’en suis fait beaucoup. » Famille pauvre à Angers, vivant des 790 euros de pension d’invalidité du père, complétés par le petit salaire de sa mère caissière. Mais une famille chaleureuse, intelligente, digne. Même si, lors d’un dîner de Noël, François ricanera, insensible à la fraternité du moment, qu’elle « n’est quand même pas jojo, la famille Massonneau... » ! Hollande l’hédoniste pratique les palaces et les grands restaurants, il déteste les parvenus, mais il n’aime pas les pauvres non plus. C’est pourtant lui qui lui répétait, du temps des déclarations d’amour, qu’il l’aimait aussi « parce que tu n’as pas oublié d’où tu viens ».
Ce livre renferme une somme d’intimes blessures et d’humiliations qui révèlent une femme plus complexe que cette caractérielle irascible et incontrôlable qu’on a dépeinte.
Bien sûr, il y a le Tweet de soutien à Falorni, impulsif, maladroit. On a l’impression que c’est à partir de là que tout est allé de travers. D’ailleurs, lors d’une de leurs nombreuses disputes, François lui lâche qu’« on aurait peut-être dû se séparer à ce moment-là ». Ensuite, Valérie semble accumuler les coups de colère et les mines renfrognées. Mais c’est juste son incapacité à masquer son mal-être. Son sentiment d’être la compagne « illégitime », elle le répète.
A l’Elysée, on sent François Hollande de plus en plus tendu, cassant et mal dans sa peau. Débordé, surmené, englouti. Au fil du temps et des événements politiques, l’homme se barricade, se « déshumanise ». Se replie dans le non-dit. Il n’y en a plus que pour ses conseillers qui s’installent dans la place et l’isolent. Quand ils ne viennent pas brutalement faire intrusion dans la sphère privée du couple. Valérie se souvient : « Même notre salle de bains est devenue un lieu de réunion. Un jour, en fin de journée, j’ai vu Claude Sérillon y suivre le président, après avoir traversé notre chambre. Je l’ai mis dehors, outrée par tant d’indécence. » Jusqu’à ses officiers de sécurité qui se mêlent de leurs conversations. « Combien de fois ai-je dû leur demander de nous laisser un peu d’espace lorsque nous nous promenions. »
Son fiancé ne fait guère mieux quand il lui demande avant un dîner d’Etat :
« Ça te prend beaucoup de temps pour être aussi belle ?
– Oui, un peu.
– En même temps, on ne te demande rien d’autre. »
« Ça te prend beaucoup de temps pour être aussi belle ?
– Oui, un peu.
– En même temps, on ne te demande rien d’autre. »
Monsieur plaisante ? Pas du tout. « Il est froid. Ne sourit pas. Je suis son faire-valoir, mais je ne dois rien valoir. » En plus de cette indifférence glaciale, la pauvre encaisse les vacheries des médias, sans recevoir le moindre réconfort de la part de son homme. Quand, lors d’une virée filmée en province, une électrice lui lance : « Il ne faut pas épouser Valérie, nous on l’aime pas ! », eh bien, François-le-spirituel, François-la-riposte ne trouve rien à répondre, il éclate de rire. Valérie est meurtrie. « Ses silences et ses remarques acerbes me font insensiblement perdre confiance en moi. »
Elle a bien essayé un jour, à bout de nerfs, de le quitter. Elle tient trois semaines. Et revient, « droguée de lui ». Quelle passion !
Six mois après sa séparation – sa répudiation ? –, elle fait amende honorable : « J’aurais dû comprendre que ce nouveau monde n’était pas fait pour moi. Je suis entière et spontanée, j’ai grandi dans un milieu où l’on ne dissimule rien. » Evidemment, en politique, c’est tout le contraire. Hypocrisie et coups bas. On dénigre, on trahit, on flingue, on méprise. Elle se voit lâchée au bord de la route, à sa triste condition de coéquipière plus très utile. « Je sens que François ne veut plus de moi dans sa vie politique. Je suis éprise d’un homme que je sens s’éloigner avec le succès. Tout s’inverse. »
Un an et huit mois après l’élection présidentielle, tout s’est inversé, en effet : « Nous n’y arriverons pas, tu ne pourras jamais me pardonner. » Ce sont les mots de François quand Valérie, sous le choc de « l’affaire Julie Gayet », tente de recoller les morceaux. Comme avec un grand malade, il lui révèle peu à peu la dimension du désastre : la durée de sa liaison avec la comédienne daterait de plus d’un mois. Puis, la vérité se fait jour. Valérie écrit : « Nous passons à trois mois, puis six, puis neuf, et enfin un an. » On connaît la suite. Une femme bafouée sous les yeux du monde entier.
Valérie Trierweiler, le 27 janvier, à Mumbai en Inde. |
DEPUIS QUE VALÉRIE ESSAIE DE RECONSTRUIRE SA VIE, ÉTRANGEMENT, LE PRÉSIDENT LA BOMBARDE DE MESSAGES ENFLAMMÉS
Mais, étrangement, depuis qu’elle est partie, qu’elle essaie de reconstruire sa vie, « depuis qu’il est retombé à 3 % dans les sondages, comme du temps où nous étions le plus heureux », eh bien, le président la bombarde de messages enflammés. « Il me dit qu’il a besoin de moi. Chaque soir, il me demande de dîner avec lui. Qu’il veut me retrouver, quel que soit le prix à payer... » Quoi ? Après l’annonce faite à l’AFP, « je me sépare de Valérie », après cette tragédie digne de Hamlet et Madame Butterfly, et tandis que circulent les rumeurs de mariage avec Julie Gayet ? ! « Ses messages me parlent d’amour. Il m’écrit que je suis toute sa vie, qu’il ne peut rien sans moi. » La plupart du temps, elle essaie de ne pas répondre. Mais il la harcèle. Quand elle finit par répondre, le tempo s’intensifie. Jusqu’à 29 Textos en une journée ! Valérie s’interroge : « Croit-il ce qu’il écrit ? Ou suis-je le dernier caprice d’un homme qui ne supporte pas de perdre ? Il me dit qu’il me regagnera comme si j’étais une élection. » Un psy parlerait de syndrome de toute-puissance, affection bien connue chez les politiques.
Oui, une reconquête amoureuse mettrait du baume à son narcissisme malmené. Entre un rendez-vous avec Obama et un autre avec Poutine, le Président textote frénétiquement, trouve le temps de lui faire envoyer des fleurs dans sa chambre d’hôtel sans qu’elle lui ait dit où elle descendait ! Mieux : quand il la voit en photo à New York avec Hani, un bel informaticien libanais aux cheveux poivre et sel, François se vexe. Blessure d’orgueil ? Ou stratégie de charmeur pour empêcher son ex-girlfriend, « fille de la Zup, prête à tout », d’écrire un livre qui révélerait tous les secrets d’Etat ?
Question secrets d’Etat, il peut dormir sur ses deux oreilles. Valérie parle d’amours, de déchirures et de passions. Elle raconte une fabuleuse tranche de vie, mais aussi une femme en souffrance, mutilée par la politique. Elle s’est donnée tout entière, a « épousé » un homme et sa cause. Est allée jusqu’au bout de ses sentiments, de sa résistance. Valérie lève des secrets peut-être plus prégnants que les secrets d’Etat.
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