mardi 10 février 2015

Albert Camus / Loin des hommes / David Oelhoffen


LOIN DES HOMMES
Le film de David Oelhoffen

Le point de départ est une nouvelle d’Albert Camus, L’hôte, une petite histoire d’une quinzaine de pages au sein du recueil L’Exil et le Royaume. Dans celle-ci, à l’aube de la guerre d’Algérie, un instituteur européen se voit confier un paysan algérien accusé du meurtre de son cousin. Si le texte de Camus se concentre sur la nuit partagée entre les deux hommes, seuls au sein de l’Atlas, le film d’Oelhoffen se poursuit au petit matin, Daru acceptant finalement d’amener Mohammed à la ville voisine pour y être jugé par la loi française.
Pour étoffer son scénario, Oelhoffen se sera plongé dans les autres écrits de Camus, ses livres, ses articles, trouvant dans les mots, histoires et perspectives de l’auteur, de quoi reprendre le fil narratif là où on l’avait laissé.
Deux hommes, tous deux en marge de leur milieu social respectif, sans appartenance claire dans ce conflit qui se dessine devant eux durant une épopée qui relève presque du grand western épique, mais un western sensible, intelligent et surtout, hautement politique.

Des Algériens qui ont combattus dans l’armée française et qui maintenant ont pris le maquis ; des militaires Pieds noirs qui tirent sur des Algériens qui se rendent. Des violences qui ne font que commencer et qui prennent en otage deux outcasts aux prises avec d’importants combats moraux. Au fil des rencontres, Oelhoffen fait le portrait d’une Algérie alors sur le bord de l’ébullition, où la tradition se fait aussi forte que l’empreinte du colonialisme.
Viggo Mortensen, en instituteur vivant retiré du monde, heureux d’enseigner l’écriture à de petits élèves arabes, joue dans trois langue plutôt qu’une, du Français à l’arabe en passant par l’espagnol, expliquant au passage un accent étranger par tout à fait franco-français. Reda Kateb est bouleversant d’humilité en paysan simple qui s’avère d’une grande dignité et d’un courage insoupçonné. Dans un décor à couper le souffle, David Oelhoffen filme avec un grand amour de l’homme un conte moral tout simple, au sein d’une fresque lumineuse.



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