samedi 13 décembre 2014

Shakespeare / Le Soliloque d'Hamlet




Le Soliloque d'Hamlet
Par William Shakespeare
Traduit par A.Z. Foreman


Voici la question: d'être ou de ne pas être.
Dans l’âme serait-il noble de me soumettre
A la fronde et les dards d’un destin altier
Ou contre tout un flot de misères m’armer
Dans une insurrection, afin de les détruire?
Mourir et donc dormir....rien davantage, et dire
Que ce sommeil met terme aux angoisses du cœur,
Et ce legs corporel d'un terrestre douleur...
Telle terminaison tenterait l’âme avide:
Dormir...et puis rêver. Mais le rêve intimide.
Car le rêve qui vienne en ce sommeil des morts
Aux esprits dépouillés de la coque du corps
Nous donne à reflechir. Voilà la réticence
Dont naît l’adversité d’une longue existence.
Car qui supporterait le fouet, le dédain
D’un monde médisant, la haine du hautain,
L’oppression du tyran, de l’amour la souffrance,
Les lenteurs de la loi, l’altière inexpérience
De chaque grand en place, et l’avilissement
Que l’indigne refile au mérite patient
Alors que de ce monde il pourrait bien s’absoudre
Avec un poignard nu qui devrait tout résoudre?
Qui en effet pourrait porter un poids pesant,
Sous la vie accablante en geignant, en suant,
Sans être épouvanté par l’au-délà, la terre
Dont nul n’a jamais pu repasser la frontière,
Qui trouble le dessein en nous faisant souffrir
Les maux que nous avons plutôt que de les fuir
Vers un mal inconnu? Ainsi la conscience
Fait de nous des poltrons. Ainsi l’homme qui pense
Change les teints natifs de la résolution
En malade pâleur avec sa reflexion,
Et ainsi des projets d’une haute volée
Se détournent toujours du cours à cette idée,
Perdant le nom d’"action".

Lawrence Olivier

To be, or not to be--that is the question:
Whether 'tis nobler in the mind to suffer
The slings and arrows of outrageous fortune
Or to take arms against a sea of troubles
And by opposing end them. To die, to sleep--
No more--and by a sleep to say we end
The heartache, and the thousand natural shocks
That flesh is heir to. 'Tis a consummation
Devoutly to be wished. To die, to sleep--
To sleep--perchance to dream: ay, there's the rub,
For in that sleep of death what dreams may come
When we have shuffled off this mortal coil,
Must give us pause. There's the respect
That makes calamity of so long life.
For who would bear the whips and scorns of time,
Th' oppressor's wrong, the proud man's contumely
The pangs of despised love, the law's delay,
The insolence of office, and the spurns
That patient merit of th' unworthy takes,
When he himself might his quietus make
With a bare bodkin? Who would fardels bear,
To grunt and sweat under a weary life,
But that the dread of something after death,
The undiscovered country, from whose bourn
No traveller returns, puzzles the will,
And makes us rather bear those ills we have
Than fly to others that we know not of?
Thus conscience does make cowards of us all,
And thus the native hue of resolution
Is sicklied o'er with the pale cast of thought,
And enterprise of great pitch and moment
With this regard their currents turn awry
And lose the name of action.




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