
Le temps passé à lire, ou plutôt à relire deux fois après une première lecture, ce gros volume prouve, en ce qui me concerne du moins, qu’il ne se lit pas comme un roman. En effet, contrairement au désir exprimé par son auteur, Günther Anders (1902-1992), ce n’en est pas un.
Günther Anders, La catacombe de Molussie. Trad. de l’allemand par Annika Ellenberger, Perrine Wilhelm et Christophe David. Postface de Gerhard Oberschlick. L’Échappée, 574 p., 24 €
Est-ce dû à la simplicité de l’intrigue (deux hommes enfermés dans un souterrain obscur discutent pendant 44 jours – ou ce qui en tient lieu puisqu’ils ne voient rien – de la révolution à venir, destinée à balayer la tyrannie qui les a emmurés vivants), une simplicité qui tend à l’absence pure et simple ? Non, car l’un, le vieux sage Olo, et l’autre, Yegussa, tout juste arrivé et qui mourra peu après son aîné et mentor, font suffisamment revivre la Molussie, leur patrie, au fil de longs échanges, pour que de nombreuses anecdotes restituent mouvements et personnages extérieurs à leur sépulcre.C’est la structure même de l’œuvre qui n’est pas romanesque. Une succession de scènes, elles-mêmes entrecoupées de contes, qui revêtent le plus souvent la forme de saynètes, crée une sorte de spectacle permanent, dont le but est l’initiation de Yegussa, ce qui entraine le lecteur du côté du théâtre, de la partition, voire – à cause de l’utilisation du poème récité, ou de la chanson populaire – du canevas pour une revue de music-hall très particulière.