lundi 30 septembre 2019

David Lynch / «Twin Peaks», rendez-vous dans vingt-cinq ans

«Twin Peaks», rendez-vous dans vingt-cinq ans

Il est heureusement impossible de dresser une conclusion de la troisième vie de «Twin Peaks». Signalons deux grands moments, la fin de la Dame à la bûche et le triomphe de Dougie, ou Jacques Tati dans un mall. Et si «Twin Peaks» continuait?
Nicolas Dufour
Publié jeudi 14 septembre 2017 à 20:44, modifié vendredi 15 septembre 2017 à 07:37

On l’admet sans peine, tirer une conclusion globale du retour de Twin Peaks se révèle impossible. Je parcours les propos de mes collègues: il s'agit de David Lynch, avec Mark Frost, et donc l’avis exhaustif et d’autorité relève du fantasme. Tant mieux.
Pendant 18 épisodes, les deux auteurs nous ont emmenés dans un voyage plus troublant encore que ce que l’on pouvait imaginer. Ce n’est pas le déconcertant ultime chapitre – alors, Laura ne serait-elle pas morte? Ou est-elle sauvée a posteriori? – qui remettra en cause ce constat.

Kyle MacLachlan superstar

Avec l’incroyable talent complice de l’acteur Kyle MacLachlan, Twin Peaks: The Return a condensé les univers de David Lynch, les identités troubles, les substitutions, les mystères de partout, les couches électriques du réel… Et ses obsessions visuelles, à commencer par les phares de voitures sur les routes forestières de l’Etat de Washington.

La «Log Lady», vedette du salon

Dans ce foisonnement, je retiens deux points forts. La Dame à la bûche d’abord, cette bonne mère au cœur du mystère, dont la seule image, avec son bout de bois tenu comme un bébé au coin de la lampe de chevet, porte Twin Peaks. Par sa proximité téléphonique avec l’adjoint Hawk, elle a ramené de l’esprit local dans ces nouveaux épisodes. Le décès de l’actrice Catherine E. Coulson, en 2015, confère à ces moments une émotion particulière. Cette disparition, honorée à propos du personnage lui-même dans un épisode, marque comme un retour du réel, douloureux et touchant.

Dougie, celui qui révèle tout

Et puis, souvenons-nous de Dougie, c’est-à-dire le personnage de l'agent Cooper tendance ahuri, découvrant chaque trait de la société américaine, incapable de parler autrement qu’en répétant la fin des phrases de ses interlocuteurs. Baragouinant et faisant des petits dessins, ce légume intellectuel réussit à déjouer une immense escroquerie à l’assurance, à sécuriser financièrement sa famille, et à éviter nombre de conflits.
Une figure bien lynchienne, comme le souffle de Jacques Tati dans les centres commerciaux des périphéries américaines. De quoi faire de Dale Cooper le personnage le plus protéiforme de l’histoire des séries TV. Il y a quelques jours, David Lynch n’a pas exclu de remettre l’ouvrage Twin Peaks sur le métier. Qui sait?



dimanche 29 septembre 2019

Quentin Tarantino / «Once Upon a Time... in Hollywood», conte à rebours




«ONCE UPON A TIME… IN HOLLYWOOD», CONTE À REBOURS

Par Clélia Cohen
13 août 2019 à 19:56




Le neuvième film de Tarantino, roi de la pop culture américaine, raconte une journée dans le Hollywood de 1969, à la veille d’un irrémédiable point de bascule. Magnifiquement incarné par le duo DiCaprio-Pitt, le film privilégie le mythe au détriment de la profondeur historique.

On ne se souvient pas depuis quand les films de Quentin Tarantino sont devenus des numéros, mais une grosse partie de la com autour de Once Upon a Time… in Hollywood le présente avec insistance comme son neuvième film. Probablement parce que le cinéaste a souvent déclaré qu’il arrêterait après dix, et que ce chiffre le rapproche, au moins publicitairement, d’une sorte d’apothéose de carrière. Incidemment, la même impression de compte à rebours domine la première partie de ce nouveau film, qui détaille une journée passée à Hollywood par trois protagonistes, l’acteur Rick Dalton (Leonardo DiCaprio) et son acolyte cascadeur Cliff Booth (Brad Pitt), tous deux fictifs, ainsi que l’actrice réelle Sharon Tate (Margot Robbie), alors épouse de Roman Polanski et en pleine ascension vers la gloire.
Indolente, ensoleillée, la journée se déroule tout en étirements et digressions chers au réalisateur de Pulp Fiction, tandis que la date affichée du 9 février 1969 pointe vers un horizon irrémédiable, duquel le film se rapprochera en seconde partie. Six mois plus tard, tout aura changé : le 14 juillet, Easy Rider sort en salles et son réalisateur, Dennis Hopper, consume en quelques plans les vieilles habitudes d’une industrie alors gérée par une poignée de septuagénaires ; et le 9 août, Sharon Tate et quatre amis à elle sont sauvagement assassinés dans sa villa des Hollywood Hills par des membres du clan de Charles Manson, le fossoyeur du Summer of Love. Once Upon a Time… in Hollywoodexplore donc une sorte de bulle temporelle un peu indécidable où les utopies des sixties n’ont pas encore volé en éclats et où se joue, en sourdine, la transition vers le Nouvel Hollywood.
Ce calme avant plusieurs tempêtes est d’abord l’occasion pour Tarantino de modeler avec un plaisir non dissimulé la matière qu’il a sous les doigts. Même s’il clame haut et fort que Once Upon a Time… in Hollywood est la première de ses réalisations depuis longtemps qui ne soit pas un film de genre (faisant semblant de ne pas savoir que le «film sur Hollywood» est un genre en soi, de Minnelli à Altman en passant par Wilder ou Kazan), il se délecte tout de même de fabriquer de faux extraits conséquents pour constituer une filmographie à Rick Dalton : série télé western, film de guerre, western spaghetti, reportages sur ses tournages, publicités… Sa connaissance ogresque du matériau produit un voyage ébouriffant dans l’usine à images, avec ce goût pour son artisanat autant que pour ses coulisses : les cascadeurs qui zonent entre deux prises, les décors peints qui glissent le long des allées du studio, les affiches vintage dessinées à la main qui saturent presque chacun de ses plans.

Princes déchus

Au royaume de ces simulacres, Leonardo DiCaprio et Brad Pitt cheminent en princes déchus, à la fois ringards et cool. Le duo que forment leurs personnages est la réussite la plus éclatante du film. Le premier en acteur de seconde division ayant percé grâce à une de ces séries western comme Au nom de la loi ou Rawhide qui pullulaient à la fin des années 50, quand la télé se mit à «resucer» comme un vampire tout ce qui avait fait le lustre du classicisme hollywoodien. Mais contrairement aux deux immenses stars issues de ces exemples (Steve McQueen et Clint Eastwood), lui n’a jamais passé la vitesse supérieure, et le voilà, une décennie plus tard, réduit à jouer les guest stars dans les séries des autres, essayant tant bien que mal de se souvenir de son texte malgré l’alcool ingurgité la veille au soir, et sincèrement bouleversé, voire étonné, quand on le complimente sur son jeu - très belle séquence avec une enfant-actrice déjà redoutablement concentrée sur sa carrière, tandis que lui l’est si peu, ou si mal.
Brad Pitt, quant à lui, interprète son cascadeur attitré mais qui, progressivement désœuvré à mesure que les rôles de Dalton se sont modifiés, s’est peu à peu reconverti en son chauffeur et homme à tout faire. Chaque soir, il le dépose après le studio, avant de rentrer chez lui au volant de son petit bolide idéalement rouillé, direction l’autre côté des collines : la San Fernando Valley, beaucoup moins glamour que Hollywood, où il habite une simple caravane isolée à proximité d’un drive-in… Toujours flegmatique et solaire, il dissimule pourtant une violence qui peut jaillir çà et là (jusqu’à tendre vers un carnage potentiel). Il ne vit que dans l’ombre déjà vacillante de Rick Dalton, et semble s’en contenter sans la moindre trace d’amertume. Réunis pour la première fois à l’écran, les deux énormes stars trouvent une vraie alchimie dans la dynamique de leurs personnages respectifs, Pitt n’ayant jamais atteint, malgré les succès, le statut de grand acteur virtuose dévolu à DiCaprio, de dix ans son cadet. Tous deux avaient pourtant été traités à la même enseigne de «joli blond jetable» lorsqu’ils ont émergé à peu près en même temps dans les années 90. Il ne reste plus grand-chose du DiCaprio éthéré de cette époque, tandis que Pitt en conserve son beau torse bronzé, que Tarantino se plaît à exhiber en le bardant de cicatrices.

Gloire vintage

L’affection résignée qu’ils ont l’un pour l’autre, leurs solitudes parallèles, le monde finissant qu’ils incarnent, donnent au film sa couleur sentimentale, renforcée par ses penchants déambulatoires. Car il était une fois, et peut-être plus que tout, une ode à Los Angeles reconstitué dans sa gloire vintage avec un amour infini, sans recours aux trucages numériques, parsemé d’enseignes et de néons aux frontons des restaurants et cinémas pas forcément mythiques (le resto préféré des producteurs de l’âge d’or Musso & Frank, mais aussi le fast-food mexicain basique Taco Bell), que Tarantino prend plaisir à regarder s’allumer à la tombée du soir, comme autant de vestiges archéologiques pour cette ville née de nulle part sur un lopin de désert peu de temps après la fin de la ruée vers l’or. C’est son seul patrimoine. Et on a parfois l’impression que le cinéaste a fait ce film juste pour filmer Leo et Brad en train de «cruiser» gracieusement en voiture sur Hollywood Boulevard au son de la radio, prenant à l’occasion une hippie en stop avec un joint pour tout paiement, exactement comme dans Model Shop, flânerie californienne de Jacques Demy filmée la même année - le film de Demy fait partie, avec neuf autres, d’une liste communiquée par Tarantino, à potasser avant de voir le sien.
A côté de cet hédonisme angelino fatigué incarné par le trio DiCaprio-Pitt-LA, la trame Tate-Manson paraît beaucoup moins aboutie. Malgré les efforts louables de Margot Robbie, Sharon Tate fonctionne ici plus comme «figure» que comme réel personnage, une sorte de vecteur charmant pour nous mener en dansant, entourée de Steve McQueen et Mama Cass, à la rencontre de la jet-set de l’époque et des fêtes données à la Playboy Mansion. Si sacrée qu’elle n’est qu’effleurée, sauf lors d’une séquence attendrie où elle se découvre à l’écran dans un cinéma de Westwood.

Timidité et admiration

Charles Manson quant à lui se contente d’une apparition fugace, et ses adeptes, surtout des filles à cheveux longs parquées dans un ranch désaffecté, sont loin d’apparaître aussi inquiétantes qu’il le faudrait. Le mal, ici, ne se regarde pas en face. Ou alors il ne s’agit que de le «surpasser», par la violence revancharde d’une résolution gore aux penchants complaisants. Et l’on est en droit de se sentir hermétique à cette overdose d’hémoglobine, qui prolonge depuis Inglorious Basterds un curieux rapport du réalisateur envers l’histoire comme quelque chose qui doit forcément être modifié par les moyens fantasmatiques du cinéma.
Heureusement, le film ne s’arrête pas là, et c’est là que Tarantino semble avoir grandi. Le vrai finale orchestre une rencontre «toute simple» autour d’un portail et d’un interphone entre Rick Dalton et l’un des occupants de la villa voisine de la sienne, Jay Sebring (coiffeur, membre de l’entourage de Sharon Tate et son ex-petit ami), incarné par Emile Hirsch. DiCaprio n’a peut-être jamais été aussi merveilleux que lorsqu’il se tortille en regardant ses pieds tandis que Sharon Tate lui parle à l’interphone, rejouant la timidité de Tarantino lui-même vis-à-vis de l’actrice pointée plus haut. Entre le has-been en fin de course et le jeune branché qui lui exprime sous les étoiles tout son amour de fan, entre la timidité du premier et l’admiration décomplexée du deuxième, ils partagent soudain, en plus de tous leurs silences gênés, cette sensation volatile et triste d’un dernier été passé à Hollywood.

samedi 28 septembre 2019

L’art d’écrire / Woolf, Breton, Perec ou les années de formation

Flaubert
David Levine


Annie Ernaux

L’art d’écrire

L’art d’écrire : Woolf, Breton, Perec ou les années de formation

L’art d’écrire. Je me suis demandé pourquoi cette formulation me jetait dans la perplexité. Avait même quelque chose de glaçant. Si je pense à Madame Bovary, je vois des lieux, les comices agricoles, la pharmacie Homais, des scènes, Emma faisant siffler sa ceinture en se déshabillant dans une chambre d’hôtel, puisant à pleines mains l’arsenic, s’en barbouillant. Si je dis La Nausée, je vois le café, le jardin public, une sorte de couleur jaune, qui est peut-être celle de la lumière du mois de février où j’ai lu le livre pour la première fois. Le contrat social est inséparable du coup de gong de la phrase inaugurale se propageant sur la surface de la terre : L’homme est né libre et partout il est dans les fers. J’éprouve tantôt la sensation exaltante d’une vérité, tantôt d’un agrandissement de moi-même et du monde.

Même si je sais que tout cela est un « effet de l’art », qu’on peut analyser – je l’ai fait longtemps, par métier – ce qui compte, c’est le paysage inconnu brusquement découvert, ce sont les désirs et les pensées qui surgissent. C’est la « forme » que certains textes ont donnée à mon rapport au temps, aux autres, au politique. À ma vie. À mon désir d’écrire moi-même.  D’où il m’a paru que je pouvais comprendre « l’art d’écrire » comme une invitation à évoquer les écrivains dont la lecture, plus particulièrement, a été déclenchante de ce désir.

Virginia Woolf

Entre 20 et 25 ans – dans les années soixante, donc – l’œuvre de Virginia Woolf a exercé sur ce désir d’écrire une emprise totale. À peu près en même temps, le surréalisme avec le Manifeste de Breton s’est offert comme un projet total de vie et d’écriture. À peine plus tard, il y eut la révélation des Choses de Georges Perec. Aujourd’hui, je m’en rends compte, c’est moins un art d’écrire que j’ai cherché en eux, que j’ai reçu d’eux, mais des voies nouvelles, accordées à des formes de sensibilité au monde qui m’étaient proches ou auxquelles j’aspirais. J’aimerais retrouver, pour les faire partager, la ferveur, la stupeur éblouie qui ont été les miennes en découvrant Mrs DallowayLes VaguesNadjaLes Choses. J’en doute : si j’ai un regret à exprimer dans le fait d’écrire moi-même depuis longtemps, c’est celui d’avoir perdu la capacité, non d’admirer, qui demeure intacte, mais celle d’être envahie complètement par un texte, un écrivain, comme Breton raconte qu’il le fut par Rimbaud à Nantes, en 1915.

Dans une lettre à Vita Sackville-West, Virginia Woolf écrit : « Je crois que l’essentiel quand on commence un roman, c’est de sentir non pas qu’on est capable de l’écrire, mais qu’il est là, de l’autre côté d’un gouffre que les mots sont impuissants à franchir : qu’on ne pourra le tirer à soi qu’au prix d’une angoisse éperdue ». J’ai choisi cette phrase, parce qu’elle ne peut mieux signifier ce qu’est l’écriture pour Virginia Woolf, douleur certes, mais surtout quête d’un réel indicible auquel il lui faudra donner forme. Parce qu’elle signifie aussi que cette forme, justement, n’est pas préexistante. Qu’il ne s’agit pas d’une histoire à dérouler, avec des personnages, dans un cadre spatio-temporel, tel qu’on conçoit généralement le roman à l’époque où elle écrit. D’ailleurs, ce mot lui-même lui paraîtra un jour inadéquat la concernant : « J’ai l’idée qu’il faudra un mot nouveau dans mes livres pour remplacer le mot roman ».

La Chambre de JacobMrs DallowayLes VaguesLa Promenade au phare, sont autant de textes différents hissés au-dessus du gouffre mais qui, tous, ont ceci de commun, de vertigineux : c’est le gouffre lui-même – c’est-à-dire le temps et la mort – qui en est la matière et la structure. Les livres de Virginia Woolf tentent tous de donner à ressentir, sinon voir, « la chose qui est là et qui existe en dehors de nous », selon le vœu qu’elle exprime dans son Journal. Elle le fait en des structures admirables, poignantes, qui matérialisent le gouffre du temps, de cette chose qui existe hors de nous et dans laquelle l’existence humaine apparaît seulement comme une suite d’instants. Mrs Dalloway : une seule journée de la vie de Clarissa et de Septimus, rythmée par la sonnerie de Big Ben qui découpe les chapitres. Les Vagues, encore un jour, mais cette fois, à la course du soleil sur un paysage de mer, de l’aube au crépuscule, correspond le déroulement de six existences, en six monologues intérieurs, de l’enfance à l’âge mûr, si bien que la vie humaine apparaît égale à celle de la phalène au regard de la Nature. C’est peut-être La Promenade au phare qui offre la solution littéraire la plus audacieuse et la plus tragique. Entre la première partie, « La fenêtre » – occupée par le dîner et la soirée autour de Mr et Mrs Ramsay, dans la maison d’été au bord de la mer – et la troisième, « Le phare » – où s’accomplit la promesse de la promenade prévue dix ans plus tôt – s’ouvre en plein milieu brève, terrible, la partie « Le Temps passe ». Rien n’y a lieu que la dégradation des choses dans la maison vide, livrée à la puissance des éléments, dans un mouvement universel de destruction et de transformation dont une vieille femme de ménage est la geignante rhapsode. Les événements humains sont relégués dans des parenthèses, consignés en trois lignes, les mariages, les morts de Mrs Ramsay et de deux des enfants, la guerre. Toujours, dans les romans de Virginia Woolf, les disparitions ressemblent à des effacements soudains, Jacob (La Chambre de Jacob)Perceval (Les Vagues), recouverts par le quotidien et pourtant ineffaçables.

Dans cette coulée de temps inhumain qui constitue la structure profonde des textes de Virginia Woolf, les êtres sont des flux de conscience, déroulant souvenirs, pensées, désirs, sensations. Ils existent en corps, mais des corps saisis par la conscience. Il y a dans Les Vagues l’expression réitérée d’un rapport au corps différent selon les individus, les âges et le sexe :
« Comment retraverser ce gouffre immense, comment rejoindre mon corps », dit Rhoda, qui se sent séparée de celui-ci et « sans visage ».
« Je n’imagine rien au-delà de l’ombre portée de mon corps » dit Jinny, à l’inverse éblouie de son corps éblouissant.
« Mon corps a été employé chaque jour » dit Susan, la mère terrienne.

C’est une erreur de parler d’écriture de l’intériorité à propos de Virginia Woolf, sauf à dire qu’il s’agit d’une intériorité sans cesse traversée par les autres, proches ou inconnus, par leur regard, leur présence. Les six « voix » des Vagues ne cessent d’être en interaction les unes avec les autres : « Quand nous nous réunissons, il y a toujours quelqu’un dont nous souhaitons écraser l’identité sous le poids de la nôtre » dit Néville. Dans La promenade au phare, tous, mais de façon privilégiée Mrs Ramsay et Lily Briscoe, pensent, « éprouvent » les autres, leurs propos et leurs gestes, leurs silences.

Nœuds instables de relations, les êtres sont aussi des consciences « prises » dans le monde le plus matériel, le plus sensible, presque dissoutes en lui. « Il m’arrive de penser que je ne suis pas une femme mais le rayon de soleil qui éclaire cette barrière » dit Susan. Prises dans les circonstances les plus ordinaires de la vie, le repas et le bœuf en daube de Mrs Ramsay, l’achat de fleurs de Mrs Dalloway. Rien d’infime chez Virginia Woolf, mais une imbrication de détails prosaïques et de questions essentielles, un feuilleté des divers plans de conscience, qui font par exemple co-exister dans la même phrase le souci de Mrs Ramsay de mesurer le bas qu’elle tricote, son attention attirée par des chaises dépenaillées, sa pensée de la servante suisse dont le père est en train de mourir et l’ordre à son petit garçon « tenez-vous tranquille ! »

Ce que je ressens comme étant au cœur de l’écriture de Virginia Woolf, c’est un mouvement de fusion et de distance par rapport au monde, qu’elle attribue à Clarissa Dalloway « Elle passait au travers des choses comme une lame de couteau ; et en même temps elle était en dehors de tout et elle regardait. Elle avait perpétuellement la sensation, tout en regardant les taxis, d’être en dehors, très loin en mer et toute seule ». Et aussi à Bernard, l’écrivain des Vagues : « On a l’impression d’être soi-même invisible et de voir à travers les choses ».

Je doute d’avoir eu, à vingt-deux ans, dans mon adhésion spontanée à la vision de Virginia Woolf, autre chose qu’une perception floue de son art d’écrire. En revanche, bien avant que je ne lise, beaucoup plus tard, Une chambre à soi, il me paraît assuré que Virginia Woolf figurait à mes yeux l’écrivain femme qui s’était engagée le plus loin dans l’au-delà des apparences, et qu’elle était l’exemple, la voie à suivre. Fût-ce – pensais-je – au prix de la folie.

André Breton


Car j’avais lu et fait mienne cette phrase du Manifeste du Surréalisme : « Ce n’est pas la crainte de la folie qui nous fera laisser en berne le drapeau de l’imagination ». À vrai dire, c’est le surréalisme entier comme forme d’existence, incluant mais débordant de beaucoup la littérature, auquel je m’étais donnée, adonnée, en découvrant les Manifestes rédigés par André Breton qui venaient d’être rendus enfin accessibles, dans la collection Idées, en 1963. C’est donc au travers de l’écriture d’André Breton que j’ai reçu l’empreinte d’idées, de refus et de positions définissant le mouvement certainement le plus déterminant du XXème siècle dans l’art et sur la sensibilité. D’André Breton, plus que des autres, si j’excepte l’Aragon du Paysan de Paris et du Libertinage. D’abord par les Manifestes, puis NadjaL’Amour fouLes Vases communicants, Arcane 17. Des textes inclassables, théoriques et poétiques à la fois, ni romans – condamnés avec violence – ni autobiographies, mais des quêtes d’une vérité individuelle, d’un salut peut-être, que n’importe qui peut entreprendre à son tour. Des textes sinueux, rompus, laissés « battants comme des portes » qui constituent peu ou prou toujours des manifestes d’une attitude face au monde, des modes d’emploi de la vie. Car la phrase d’André Breton – structure fondamentale, unité première de son écriture – est toujours, de la sentence brève à la période, « morale ». Morale non pas en termes de bien ou de mal, mais de conduite et de style de vie. Par sa puissance, sa syntaxe impérieuse, quelque part elle « oblige », elle est constamment – pourtant si hautaine et dédaigneuse de celui qui la lit – un appel à la suivre.

Je citerai seulement quelques-unes de ces phrases – des vers, parfois – qui continuent de surgir en moi à l’improviste, comme les points d’un très ancien programme de vie et d’écriture :

Il se peut que la vie demande à être déchiffrée comme un cryptogramme
Je veux qu’on se taise quand on cesse de ressentir
Plutôt la vie avec ses salons d’attente
Quand on sait qu’on ne sera jamais introduit 
Dans ses grandes lignes le désespoir n’a pas d’importance
Ce que j’ai aimé une fois, que je l’aie gardé ou non, je l’aimerai toujours
Transformer le monde a dit Marx ; changer la vie, a dit Rimbaud ; ces deux mots d’ordre pour nous n’en font qu’un
Je persiste à tenir les opérations de l’amour pour les plus graves
Une phrase dont la résonance en moi me reste mystérieuse :
Les amours des hommes m’ont suivi à la trace, ce sont de grandes glaces bordées de velours rouge, plus rarement de velours bleu.

L’année dernière, me trouvant dans le Nord, à Bailleul, dans le cadre d’une célébration de Marguerite Yourcenar – qui, elle, m’est absolument lointaine – j’ai été abordée par une jeune écrivaine, Amina Danton. Comme une messagère inespérée, elle m’a proposé de me conduire au cimetière municipal sur la tombe de Nadja, qu’elle avait trouvée en se rendant à la Mairie et où elle venait d’aller. J’avais lu que Nadja était morte dans un asile, je ne savais pas que c’était à Bailleul, la ville même où Bruno Dumont a tourné ses premiers, sombres, films. Devant la tombe – juste un carré de terre avec une bordure en ciment et l’inscription « Léona Delcourt  1902-1941 » – je pensais à ses paroles : « André ? André ? Tu écriras un roman sur moi. De nous il faut que quelque chose reste… ». Je pensais que nous étions dans ce cimetière sous un soleil de plomb par le pouvoir d’un livre, la grâce agissante de la littérature.

À qui souhaite écrire, la proximité dans le temps avec les écrivains aimés et admirés joue un rôle. Hugo dit « être Chateaubriand ou rien ». Chateaubriand est alors son contemporain.  Comme Proust fait de Bergotte celui du narrateur de la Recherche. Il y a d’un côté la tradition littéraire avec les écrivains admirés, aimés – Rousseau, Flaubert – et la littérature perçue comme en train de se faire, dont les acteurs sont engagés dans le monde, ici, maintenant. À ce titre, la découverte de Georges Perec avec la lecture des Choses, juste au milieu des années soixante, a constitué une inflexion majeure dans ma représentation de l’écriture. Plus exactement du champ des possibles de l’écriture. Ce roman était encore moins un roman que les textes de Virginia Woolf mais il n’était pas non plus une quête authentique et poétique comme Nadja. C’était un objet textuel nouveau qui, dans les premières pages d’une interminable description, semblait d’abord ressortir au « nouveau roman » – voire au récent film L’Année dernière à Marienbad avec sa caméra attardée non moins interminablement sur des détails architecturaux – et, de fait, très vite, lui tournait le dos. C’était bien, comme l’indiquait le sous-titre « une histoire des années soixante », la saisie du parcours et des aspirations de l’actuelle génération des jeunes de la classe moyenne, représentée par le couple Jérôme et Sylvie, êtres sans contours psychologiques, définis par les goûts et les désirs communs à une génération. C’était un récit à valeur – et effet – collectifs, la généralisation extrême d’une expérience individuelle, dans laquelle l’époque se voyait en miroir. Les Choses opérait une sorte de renversement, dire non pas le général par le particulier – comme il est admis que fait la littérature – mais le particulier par le général. Et accréditait de façon heureuse, quoique tardive, la phrase de Breton dans Nadja : « Fort heureusement les jours de la littérature psychologique à affabulation romanesque sont comptés ».

En 1965, il était encore trop tôt pour percevoir que derrière cette accumulation des choses remplissant, tout en le faisant apparaître, le vide de l’existence des héros, se profilait la forme d’une entreprise dont les textes suivants dévoileront peu à peu le ressort, qui est de nature tragique. Quand il écrit en 1969 La Disparition, roman entier sans la lettre e, c’est l’exploit qui frappe mais la figure centrale de l’œuvre perecquienne est pourtant là, exhibée, rendue lisible : l’absence, le vide, le trou. Figure dont W ou le souvenir d’enfance, quelques années après, donne la clef : l’absence de souvenirs d’enfance, une mère disparue à Auschwitz, sans tombe. Les bribes arrachées à une mémoire trouée alternent avec la construction imaginaire d’un univers sportif concentrationnaire, W, et c’est dans l’intersection des efforts de l’anamnèse et de la reconstitution du fantasme, leurs reflets réciproques, que, peut-être quelque chose de l’indicible, le génocide, peut être saisi : « l’indicible n’est pas tapi dans l’écriture, il est ce qui l’a bien avant déclenché », écrit-il. À cette certitude : « Le projet d’écrire mon histoire s’est formé presque en même temps que mon projet d’écrire » s’en oppose une autre, à savoir qu’il lui est impossible d’écrire cette histoire, qu’il ne retrouvera que « l’ultime reflet d’une parole absente à l’écriture ». Il est impossible d’écrire sur le rien, sur le vide. Mais pourtant écrire, parce que – ce sont les phrases les plus bouleversantes que j’ai lues à propos de l’écriture – « nous avons vécu ensemble, parce que j’ai été un parmi eux, ombre au milieu de leurs ombres, corps près de leur corps ; j’écris parce qu’ils ont laissé en moi leur marque indélébile et que la trace en est l’écriture : leur souvenir est mort à l’écriture ; l’écriture est le souvenir de leur mort et l’affirmation de ma vie ». L’écriture consistera donc à combler le vide et l’innommable par le plein des choses, par l’inventaire inlassable de la réalité sous toutes ses formes. À remplir le trou initial de l’enfance par l’avalanche de 480 souvenirs personnels et collectifs de faits inessentiels, sans signification, cette litanie de « Je me souviens » ouverte à toutes les mémoires. À dénombrer et classer l’insignifiant, « l’infra-ordinaire », à lister objets, fiches de cuisine, récits de rêves, cartes postales, à recenser les figures de style et les habitations d’une rue. Ce qui, longtemps, est apparu comme un jeu purement formel, oulipien, relève au contraire d’un enjeu grave qui, peut-être, est aussi celui du XXIème siècle : répondre à l’amnésie et à la béance du sens par la tentative d’épuiser le réel dans sa totalité, y compris le langage, et de le mettre en ordre, le classer interminablement mais sans jamais pouvoir lui découvrir, lui donner, un sens autre que c’est là.  En même temps, cette écriture de construction/déconstruction, démultiplication de formes, est pour Perec la manière, la seule, de dire son histoire à lui, d’arracher au vide son existence et celle des siens. Et par là, il a inauguré une autre façon de se dire, il a élargi, comme personne avant lui, le champ de l’autobiographie.

Pour finir – abréger – encore une phrase d’André Breton, un précepte que, naguère, à l’époque où j’enseignais, je ne manquais pas de donner lors du premier cours : « Aimer d’abord. Il sera toujours temps, ensuite, de s’interroger sur ce qu’on aime jusqu’à n’en plus vouloir rien ignorer ». C’est à la naissance de cet amour que j’ai voulu m’attacher ici, à cette aimantation que Woolf, Breton, Perec ont exercée dans des moments successifs. Quant aux raisons d’aimer que j’ai trouvées dans l’interrogation et la fréquentation de leurs œuvres, je n’en ai signalé que certaines, celles qui, on le suspectera à juste titre, ne sont pas étrangères à mes propres préoccupations d’écriture.





vendredi 27 septembre 2019

Annie Ernaux / Biographie




Annie Ernaux


Annie Ernaux

Biographie



Annie Ernaux dans les années 60
Annie Ernaux, née Duchesne, a grandi en Normandie – à Lillebonne où elle est née en 1940, puis à Yvetot, où ses parents ont déménagé quelques années plus tard pour tenir un café-épicerie. Élève à l’école privée catholique, elle côtoie des filles de milieux plus aisés que le sien, et fait l’expérience de la honte sociale. En 1958, âgée de 18 ans, elle part pour la première fois seule, sans ses parents, travailler dans une colonie de vacances.


Là, elle fera l’expérience de la sexualité et de la vie en collectivité, expérience qu’elle livrera dans Mémoire de fille. Dans ce même livre, elle évoque aussi son séjour à Finchley, dans la banlieue de Londres, comme fille au pair en 1960, avant qu’elle ne décide d’étudier les Lettres à l’Université de Rouen, abandonnant la formation entamée pour devenir institutrice.

C’est à cette période qu’elle écrit son premier manuscrit, qui n’a jamais été publié. Les années qui suivent sont celles du mariage; de la réussite au Capes, puis à l’agrégation; de la naissance de ses deux fils; des années passées à Annecy, en Haute-Savoie, où elle est professeure dans le secondaire; et de la mort de son père, en 1967, alors qu’elle rend visite à ses parents en Normandie. En 1974, Annie Ernaux publie chez Gallimard son premier livre, Les Armoires vides, qui dépeint sous une forme romancée l’avortement clandestin qu’elle a subi en 1964, ainsi que sa trajectoire sociale de ‘transfuge de classe’. En 1977, elle déménage en région parisienne avec sa famille, quitte l’enseignement secondaire et devient professeure au Cned, le centre d’enseignement à distance. En 1983, elle publie La Place, un récit retraçant la vie de son père. Couronné du prix Renaudot, ce livre attire un large lectorat. Apres son divorce, elle continue à vivre dans la maison de Cergy où elle réside encore. Dans les années 2000, elle quitte ses fonctions d’enseignante et signe Les Années, texte perçu par beaucoup comme l’accomplissement de son oeuvre, tant sur le contenu que sur la forme d’autobiographie collective. Ce livre sera couronné du prix Marguerite Duras et du prix François Mauriac, et sa traduction en anglais a été sélectionné pour le prestigieux Man Booker International.

Annie Ernaux a reçu plusieurs prix pour l’ensemble de son oeuvre: le prix de la langue française en 2008 et le prix Marguerite Yourcenar en 2017. Ses textes ont été rassemblés en grande partie dans un Quarto publié en 2011 chez Gallimard (Ernaux est la première femme à être publiée dans cette édition de son vivant). En 2014, elle a reçu le titre de docteure Honoris Causa, décerné par l’Université de Cergy-Pontoise.




Publications

Livres

Textes courts et articles

  • « Y. ville nouvelle », Roman 5 (automne 1983), 27-35.
  • « Visite », Le Figaro (13 novembre 1984), 27, texte reproduit dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 494-95.
  • « L’Écrivain en terrain miné », Le Monde (23 mars 1985), 21.
  • « Histoires », Autrement 69 (avril 1985), 94-7, texte reproduit dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 485-89.
  • « Retours », L’Autre journal 4 (avril 1985), 70-1, texte reproduit dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 490-93.
  • « Cesare Pavese », Roman 16 (septembre 1986), 60-1, texte reproduit dans « Annie Ernaux/Albert Mémmi », revue Tra-jectoires 3, ed. Amaury Nauroy (2006), 132-33 et dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 598-99.
  • « Insatisfaction », Nouvelles nouvelles, numéro spécial (mars 1988), 12-6, texte reproduit dans « Annie Ernaux/Albert Mémmi », revue Tra-jectoires 3, ed. Amaury Nauroy (2006), 100-103.
  • « Annie Ernaux », in Le Dictionnaire : Littérature française contemporaine, ed. Jérôme Garcin (François Bourin, 1988), 177-83.
  • « Mes points de vue successifs sur le mariage », Autrement 105 (mars 1989), 12.
  • « Quelque chose entre l’histoire, la sociologie et la littérature », La Quinzaine littéraire 532 (16-31 mai 1989), 13.
  • « Littérature et politique », Nouvelles nouvelles 15 (été 1989), 100-3, texte reproduit dans « Annie Ernaux/Albert Mémmi », revue Tra-jectoires 3, ed. Amaury Nauroy (2006), 98-99 et dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 549-51.
  • « Images, questions d’URSS », Europe (juin-juillet 1989), texte reproduit dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 600-03.
  • « Leipzig, passage », Instants (1991), texte reproduit dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 689-92.
  • « Une Sensibilité humaine », L’Humanité (2 février 1993).
  • « Vers un je transpersonnel », RITM 6, Université de Paris-X (1993), 219-22.
  • « Une Vision singulière et universelle », L’Humanité (15 septembre 1993).
  • « Lectures de Passion simple », La Faute à Rousseau 6 (juin 1994), 27-9.
  • « Tout livre est un acte », Europe 784-5 (août-septembre 1994), 18-24, texte reproduit dans « Annie Ernaux/Albert Mémmi », revue Tra-jectoires 3, ed. Amaury Nauroy (2006), 116-23.
  • « L’Enfance et la déchirure », Europe 798 (octobre 1995), 77-83, texte reproduit dans « Annie Ernaux/Albert Mémmi », revue Tra-jectoires 3, ed. Amaury Nauroy (2006), 124-31.
  • « Fragments autour de Philippe V. », L’Infini 56 (hiver 1996), 25-6.
  • « Hôtel Casanova », écrit en 1998, reproduit dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 481-84.
  • « Journal de bord 1997-1998 (extraits) », Le Monde (28 mars 1998).
  • « Vocation ? », La Faute à Rousseau 20 (février 1999), 33-5.
  • « De l’autre côté du siècle », Nouvelle Revue Française 550 (juin 1999), 96-100, texte reproduit dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 693-94.
  • « Passage à l’heure d’été », Libération (1 avril 2000), 6.
  • « Comment L’Événement a été reçu par lectrices et lecteurs », La Faute à Rousseau 24 (juin 2000), 33-5.
  • « Parmi les rares photos de famille… », in Acteurs du siècle, ed. Bernard Thibault (Le Cercle d’Art, 2000), 43-53.
  • « ‘Le Fil conducteur’ qui me lie à Beauvoir », Simone de Beauvoir Studies 17 (2000-01), 1-6, texte reproduit dans « Annie Ernaux/Albert Mémmi », revue Tra-jectoires 3, ed. Amaury Nauroy (2006), 109-116 et dans les Cahiers de L’Herne: Simone de Beauvoir, dir. E, Lecarme-Tabone & J.-L. Jeannelle (2013)
  • « Journal d’écriture », extraits de 1989 et 1998, Les Moments littéraires 6 (2001), 16-23 et 24-31.
  • « Première enfance », in Jardins d’enfance, ed. Clarisse Cohen (Le Cherche midi, 2001), 79-88.
  • « L’Occupation », Le Monde (4 août 2001).
  • « Bourdieu, le chagrin », Le Monde (6 février 2002), 1, texte reproduit dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 912-14.
  • « L’Homme de la poste, à C. », in Histoires à coucher dehors, eds Claude Chaumeil et Nathalie Mège (Julliard, 2003), 11-7, texte reproduit dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 915-18.
  • « Sur l’écriture », LittéRéalité XV : 1 (printemps-été 2003), 9-22.
  • « Mise à distance », Revue des deux mondes (juillet-août 2003), 100-3, texte reproduit dans « Annie Ernaux/Albert Mémmi », revue Tra-jectoires 3, ed. Amaury Nauroy (2006), 95-97.
  • « Épilogue: raisons d’écrire », in Le Symbolique et le social : La Réception internationale de la pensée de Pierre Bourdieu. Actes du colloque de Cerisy-La-Salle, eds Jacques Durand et Yves Winkin (Liège : Éditions de l’Université de Liège, 2005), 343-7; reproduit dans « Annie Ernaux/Albert Mémmi », revue Tra-jectoires 3, ed. Amaury Nauroy (2006), 103-9, et dans Nottingham French Studies 48:2 (été 2009), 10-14.
  • « À Florence Aubenas », Télérama 2879 (16 mars 2005), 9.
  • « Journal 2005 (extrait) », extraits de la période du 6 mai au 30 novembre 2005. « Dossier Annie Ernaux : une œuvre de l’entre-deux » (2), in : http://www.libr-critique.com/.
  • « Questionnaire de Proust: Annie Ernaux », L’Express (1er mai 2016).
  • « Journal intime (inédit), du 24 janvier au 19 février 2002 (autour de Pierre Bourdieu) », Tra-jectoires 3, dossier « Annie Ernaux/Albert Memmi », ed. Amaury Nauroy (2006), 147-51.
  • « La Fête », Le Monde 2 (14 octobre 2006), 71-72, texte reproduit dans Écrire la vie (Gallimard, Quarto, 2011), 919-23.
  • « Fils de la honte », sur Retour à Reims de Didier Eribon, Le Nouvel Observateur 22-28 (octobre 2009), 118.
  • « Le jeune homme de Venise », Le Devoir (16 novembre 2011).
  • « 1er Mai, alerte à l’imposture ! », Le Monde (28 avril 2012).
  • « Le pamphlet fasciste de Richard Millet déshonore la littérature », Le Monde (10 septembre 2012).
  • « Préface », Tomasini, Olivier. Vanité plurielle / photographies/Olivier Tomasini, [textes de Charles Zalber, Annie Ernaux, Marie-Loup Sougez, et al.] (Grenoble : Critères éd, 2012).
  • « C’est extra », Nouvelle Revue Française 601 (juin 2012), 50-56.
  • « La Distinction, œuvre totale et révolutionnaire », conférence prononcée en 2004, in Pierre Bourdieu. L’insoumission en héritage, Édouard Louis (dir.), Presses Universitaires de France (2013), 17-48.
  • « Oui à des grandes écoles vraiment pour tous » Annie Ernaux/Pierre Gallois/Véronique Munoz-Dardé, Le Monde (7 janvier 2014).
  • « Rapport de faits », Nouvelle Revue Française 620 (septembre 2016), 11-21.
  • « Un Prix. Que signifie ‘recevoir un prix?’ », à l’occasion de la remise du prix Yourcenar, Bibliobs (12 décembre 2017).
  • « Les médusantes », in Mylène Besson, Les Femmes qui rient, Regard éditions Marie Morel, 2018.
  • « Mémoire du chemin de fer », in Collectif, La Bataille du rail : Cheminots en grève, écrivains solidaires (Don Quichotte éditions, 2018), 63-68.
  • « Il n’y a pas de nouveau monde, ça n’existe pas », Libération (9 décembre 2018).
  • « Gilets jaunes : ‘La symbolique monarchique s’est retournée contre Emmanuel Macron », Télérama (11 décembre 2018).
  • « Soror Lila », Libération (13 mars 2019).