Quentin Blake : “Quand je rencontre des petits, je m’adresse à eux comme à des adultes”
Laurence Le Saux
19 / 02 / 2015
Une enfance heureuse malgré la guerre, la passion du dessin dès le plus jeune âge, l’enseignement… Le grand illustrateur nous ouvre l’album de sa vie.
Il fut l’illustrateur de quasi tous les livres de Roald Dahl (Charlie et la chocolaterie, Matilda, Le Bon Gros Géant…). Trésor national anglais, sir Quentin Blake, 82 ans, a marqué les yeux et les esprits. Rencontre avec un épatant dessinateur au trait vif, corrosif, et drôle, qui publie son parcours artistique dans Pages, mots, images.
J’étais un petit garçon sérieux, je dessinais beaucoup, j’adorais cela. J’avais un grand frère de dix ans plus vieux que moi, engagé dans la Royal Air Force, ce qui faisait de moi une sorte d’enfant unique. A l’école, j’aimais l’anglais, la littérature – avec le club de théâtre on jouait du Shakespeare. Mon quotidien dans la banlieue de Londres n’était pas très intéressant. Pendant la Seconde Guerre mondiale, je n’ai pas eu le sentiment d’être traumatisé. Certes, je me souviens de lumières inhabituelles dans le ciel, du Blitz, de cavales vers les abris. Mais rien de dramatique. Mon père était fonctionnaire, ma mère restait à la maison : tous deux avaient vécu pendant dix ans en France, avant ma naissance. Ils étaient très gentils, même s’ils ne comprenaient pas ce que je fabriquais, à dessiner toute la journée. Ils ne m’encourageaient ni ne me freinaient. Je me souviens avoir longtemps observé les oiseaux, j’adorais – et j’adore toujours – les représenter, je ne sais pas pourquoi.
On peut considérer chaque ouvrage comme une leçon de vie, même si cela paraît prétentieux. Mais je ne cherche pas spécialement à être drôle ou à donner de la joie aux lecteurs, même si cela semble arriver. D’ailleurs, je ne pense pas qu’un illustrateur doive faire passer des intentions particulières : son dessin est vivant, naturel, il s’exprime par lui-même. Je sais bien que mes livres sont lus par des enfants, toutefois je ne dessine pas spécifiquement pour eux. Je m’adapte à l’œuvre que je dois illustrer, pas à l’audience qu’elle vise. D’ailleurs, quand je rencontre des petits, je m’adresse à eux comme à des adultes.
De quelle façon avez-vous abordé votre métier de professeur au Royal College of Art ?
J’ai commencé à enseigner pour l’argent, et j’ai continué pendant vingt ans, même quand je n’en avais plus besoin financièrement… Je considérais mes étudiants comme des artistes, je conversais simplement avec eux. Je ne me sentais pas meilleur qu’eux, j’estimais juste que j’avais pratiqué notre art pendant beaucoup plus longtemps qu’eux !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire