Les Murray
Poésie et religion
Les religions sont des poèmes. Elles concertent
notre esprit diurne et onirique, nos
émotions, instinct, souffle et geste originel
dans la seule façon totale de penser : la poésie.
Rien n’est dit tant que ça n’a pas été rêvé en mots
et rien n’est vrai qui ne consiste qu’en mots.
Un poème, comparé à une religion accomplie,
peut être comme la seule brève nuit nuptiale dont
meurt et vit le soldat. Mais c’est une petite religion.
La pleine religion est le grand poème de l’amour itératif ;
comme tout poème, elle doit être inépuisable et complète
avec des endroits où nous demandons : Pourquoi le poète a fait ça ?
On ne peut prier un mensonge, disait Huckleberry Finn ;
on ne peut pas le poétiser non plus. C’est le même miroir :
mobile, oblique, étincelant, nous l’appelons poésie,
fixé au centre, nous l’appelons une religion,
et Dieu est la poésie prise dans chaque religion,
prise, pas emprisonnée. Prise comme dans un miroir
qu’elle a attiré, étant dans le monde comme la poésie
est dans le poème, une loi contre sa fermeture.
Il y aura toujours de la religion tant qu’il y aura de la poésie
ou son absence. Toutes deux sont données et intermittentes,
comme la façon d’agir de ces oiseaux – colombe lophote, perroquet rosella –
qui volent les ailes fermées, puis les battent et les referment à nouveau.
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