samedi 25 novembre 2017

Tom Ford et le parfum : dix ans de provocations sensuelles

Tom Ford et le parfum : dix ans de provocations sensuelles

Par Emilie Veyretout | Le 13 janvier 2017

Clivant, le designer texan ? C’est un euphémisme. Alors que son deuxième long-métrage déchaîne la critique, depuis dix ans déjà ses odeurs de cocaïne, d’ambre sensuel et de truffe passionnent les adeptes de sillages singuliers.

Sur les affiches dans le métro, forcément, les adjectifs sont dithyrambiques. « Électrisant », « magistral », « enivrant ». Dans les pages des journaux, les critiques de Nocturnal Animals, le nouveau film de Tom Ford (récompensé à la Mostra de Venise 2016) sont moins élogieuses. « Plein de clichés, esthétisme démodé », tranche notre confrère Éric Neuhoff.
Le couturier américain, homme de communication hors pair, a le talent de diviser. Sa collection de fragrances en atteste : en boutiques comme dans la rue, les gens adorent ou détestent ses notes sophistiquées d’ambre, de tabac ou d’oud, ses formules complexes souvent à contre-courant de la tendance. Exemple, en pleine mouvance gourmande, la récente série de quatre jus verts aux accents seventies à tomber (Private Blend).
« Nos clients ont tous un peu le même profil, des personnalités raffinées, des connaisseurs du parfum, rapporte une vendeuse. Ils ne veulent pas sentir comme tout le monde, et ce désir de différenciation frise la provocation. » Il en faut pour réclamer, sur un stand de grand magasin, « celui qui sent la cocaïne » - Tuscan Leather, un accord cuir, safran et framboise auquel Jay Z dit être accro dans sa chanson Tom Ford.


Moins cher qu’une Maserati



Derrière la provocation, adjuvant intéressant dans l’univers lisse de la parfumerie actuelle, le Texan fait preuve de flair. « Je suis né avec une passion pour le parfum. Je me souviens qu’à Santa Fe, quand j’étais enfant, je sentais tout, tout le temps », confie cet autodidacte qui assure que, lorsqu’on est passionné par quelque chose, on apprend facilement. Il dit encore, crâne: «Tout le monde ne peut pas s’offrir une Maserati, mais la plupart des gens peuvent acheter un flacon. »
En 2006, l’ancien directeur artistique de Gucci lance, avec le groupe ­Estée Lauder, Black Orchid. L’héroïne alanguie, la fiole sous influence Art déco et l’accord ténébreux - orchidée noire, truffe et cacao - plantent la mécanique Tom Ford Beauty : vintage, sensualité, luxe. Suivent des déclinaisons comme Velvet Orchid cet ­hiver, une ligne de maquillage (fards à paupières lamés, terre de soleil et ­rouges à lèvres carmin) mais, surtout, Private Blend, sorte de « laboratoire » : sa trentaine de formules ­unisexes, plus confidentielles, est ultracompartimentée par familles traditionnelles - cuirés, floraux, orientaux, tabacés, etc. - comme au temps de la grande époque de la parfumerie, dont Tom Ford est nostalgique. Il ne les cite pas, mais collabore avec plusieurs nez, dans différentes maisons (Robertet, IFF…). Et selon les professionnels, ses briefs seraient parmi les plus intéressants du secteur.
« Les parfumeurs aiment travailler avec moi car je ne fais pas de tests marketing, je leur dis : “Montrez-moi quelque chose que vous aimez”, explique le designer. Quand quelqu’un crée pour vous, l’essentiel est de l’inspirer. Alors, à ce moment-là, vous obtenez des merveilles. » Dans la liste, citons Neroli Portofino, une fleur d’oranger devenue un must du genre, l’oriental sexy Jasmin Rouge ou encore Tobacco Vanille, le préféré des gentlemen avec ses notes cognac, tabac et pain d’épices.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire