lundi 26 mars 2018

Seven Seconds / Pourquoi il faut regarder cette série Netflix entre The Killing, The Wire et The Night of



Seven Seconds : pourquoi il faut regarder cette série Netflix entre The Killing, The Wire et The Night of

Mise à jour : 24/03/2018 16:31 - Créé : 2 mars 2018 - Alexandre Janowiak

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Après avoir mis en ligne Altered Carbon et Everything Sucks !, Netflix a dévoile une troisième série inédite en ce mois de février 2018 avec Seven Seconds. Une enquête policière sur fond de tension communautaire, injustice sociale et ancrée dans l'actualité américaine. Que vaut cette première saison ?
ATTENTION QUELQUES SPOILERS !


SANS ARME, AVEC HAINE, AVEC VIOLENCE

Tout commence par ce joli générique porté par la magnifique chanson Love & Hate de Michael Kiwanuka (son Cold Little Heart avait déjà été utilisé pour le générique de la non moins excellente série Big Little Lies). Les paysages paisibles et relaxants de la région New-Yorkaise se mêlent alors aux scènes de violences ou d’altercations entre les autorités et la communauté afro-américaine, le tout sous l’œil d’une justice arbitre de ce conflit social.
Puis, après ce rapide générique, une voiture apparait. Un homme, Peter Jablonski (Beau Knapp et sosie non-officiel de Pablo Schreiber) se rend à l’hôpital pour rejoindre sa femme hospitalisée. Alors qu’il quitte la route des yeux un instant pour regarder son téléphone, il percute quelque chose : un vélo et sans doute un enfant. Quelques minutes plus tard, ses collègues arrivent sur place et le chef DiAngelo constate le désastre. Ensemble, ils font tout pour cacher les preuves de cet accident, laissent le jeune pour mort dans un fossé et quittent les lieux.

PhotoL'erreur d'une vie ?

Plus tard, le pilote nous révèle que la victime est un adolescent noir. Pire, contrairement à ce qu'avait affirmé DiAngelo (excellent David Lyons), il n'est pas mort. En fait, le jeune adolescent afro-américain, du nom de Brenton Butler, a agonisé pendant près de 12 heures dans le froid glacial du parc de Jersey City avant d'être secouru par des passants et transporté à l'hôpital.
Une enquête est donc lancée par les autorités d'un côté, quand la famille de la victime va tout faire pour comprendre les raisons de cet acte ignoble. Au-delà, l'accident déclenche un soulèvement progressif de la communauté afro-américaine de Jersey City contre les autorités.

Photo , Regina KingRegina King, la mère, et Clare-Hope Ashitey, la substitute du procureur

QUE JUSTICE SOIT FAITE

La série vient à peine de commencer que les enjeux majeurs de Seven Seconds sont déjà mis en place. En quelques minutes, le show de Veena Sud (créatrice de Cold case : Affaires classées et showrunneuse de The Killing US) dévoile tout ce qui fera le cœur de la série.
Bien évidemment d’un côté, ce sera une enquête policière menée par la substitute du procureur alcoolique KJ Harper (Clare-Hope Ashitey vu dans Les Fils de l’homme) et l’inspecteur Joe "Fish" Rinaldi (Michael Mosley) pour savoir qui a percuté cet adolescent afro-américain et l’a laissé mourir derrière une bute. Cependant, grâce à l’ouverture, les enjeux de Seven Seconds sont ailleurs pour le spectateur puisque nous savons tout de l'accident, du coupable aux circonstances.

Photo Clare-Hope Ashitey, Michael MosleyKJ et Fish

Seven Seconds ne veut pas être une simple série policière comme on en a vu des milliers par le passé. A l’heure de la présidence Trump, elle préfère se concentrer sur des thématiques qui fracturent actuellement le pays. Ainsi, loin d'être une série à enquête ou un simple drame familial, la série de Veena Sud s'attache plutôt à comprendre les conflits raciaux, les tensions communautaires ou les heurts entre la police et la communauté afro-américaine.
Bien au-delà, elle remet surtout en cause les institutions même des Etats-Unis, notamment la justice américaine, la corruption des autorités et pose de nombreuses questions sur la morale et l'intégrité du système dans sa globalité. Certes, on pourra reprocher à la série de trop jouer sur les symboles à certains moments : ce plan de la Statue de la liberté qui tourne le dos à la communauté noire défavorisée comme message subliminal d'une nation qui ignore une partie de soi. Mais globalement Seven Seconds réussit à faire passer des messages forts et à interpeller le spectateur sur des sujets importants.

PhotoTrop de symbole, tue le symbole

UN TEMPS DE RETARD ?

Techniquement parlant, on ne pourra pas non plus reprocher grand chose à Seven Seconds. Entre l'excellent pilote réalisé par Gavin O'Connor, un deuxième épisode signé Jonathan Demme (quelques semaines avant son décès) et ceux réalisés par les anciens de The Wire : Dan AttiasErnest R. Dickerson ou Ed Bianchi - la série offre une mise en scène léchée et dotée d'une magnifique photographie.
Chaque plan permet d'ailleurs à l'excellent casting de s'exprimer de bien bel manière : Clare-Hope AshiteyRegina KingMichael Mosley et David Lyons en tête de cortège, mais aussi les plus discrets Raul Castillo et Russell Hornsby.

PhotoDiAngelo, KJ Harper et Fish

Côté scénario en revanche, si Veena Sud sait parfaitement gérer son intrigue, l'étaler sur dix épisodes de 50 minutes à 1h20 était sans doute une mauvaise idée. La longueur des épisodes permet évidemment de construire correctement les personnages et de les rendre attachants, malheureusement elle provoque dans le même temps quelques pertes de rythme dommageables.
Enfin, et c'est sûrement le plus gros problème de Seven Seconds finalement : la série peine à trouver sa propre identitéVeena Sud offre une réflexion intéressante sur de nombreux sujets mais tout au long de cette première saison, on a la sensation qu'ils ont déjà été étudiés de manière plus frontale et plus profonde dans d'autres séries.
Ainsi, le système judicaire américain et ses injustices ont été remarquablement critiqué récémment dans les séries The Night Of  ou American CrimeLa corruption policière et les conflits police/afro-américain ont été plus qu'analysés par The WirePuis en tant que pure série d'enquête, The Killing de cette même Veena Sud était bien plus solide et dynamique. A bien des niveaux, il y a donc le sentiment que Seven Seconds arrive avec un peu de retard.

Photo Beau KnappOn se croirait un peu dans The Wire non ?

Seven Seconds manque parfois de rythme et ressasse sans doute des sujets mieux étudiés par le passé par The Wire, American Crime ou The Night of. Cependant, avec sa galerie de personnages attachants et bien caractérisés, une réalisation inspirée, un casting impeccable, un récit bien mené et un propos sur l'Amérique toujours pertinent, le nouveau show de Netflix reste une belle réussite.
Seven Seconds est disponible en intégralité sur Netflix depuis le 23 février.





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