Avec plus de soin que de souffle, Chanya Button met en scène la liaison intellectuelle et sentimentale entre deux femmes remarquables : Vita Sackville-West et Virginia Woolf.
le 09/07/2019 à 11:53
Modifié le 09/07/2019 à 15:44
Lorsque, d’un film, on retient avant tout le raffinement des décors et l’élégance des costumes, ce n’est guère bon signe. Surtout quand l’œuvre en question confronte deux figures remarquables, femmes de lettres et femmes de tête : les romancières anglaises Vita Sackville-West et Virginia Woolf.
De leur rencontre en 1922, ardemment recherchée par la première, jusqu’à la fin de leur liaison qui se prolongera en amitié, Chanya Button (1) s’attache pourtant à dépeindre scrupuleusement le choc de deux caractères que tout réunit et que tout oppose.
Animées par un farouche désir d’émancipation, en rupture avec les codes et carcans de la société victorienne mise à mal par la Première Guerre mondiale, Vita et Virginia puisent dans l’écriture la force et la liberté que la vie leur refuse encore. Leur mutuelle fascination repose sur l’attraction des contraires – panache de Vita contre discrétion de Virginia, trouble psychologique de Virginia contre assurance, un peu trop belle pour être vraie, de Vita.
Deux comédiennes engagées
En choisissant deux comédiennes (trop) ravissantes qu’elle nimbe de lumière délicate, Chanya Button court le risque de faire basculer son film dans le roman-photo sur pellicule glacée, écueil que le talent et l’engagement des actrices parviennent à éviter. Tantôt garçonne, tantôt ultra-féminine, Vita/Gemma Arterton traverse l’existence le sourire aux lèvres : ses brisures soudaines n’en sont que plus touchantes. Virginia/Elizabeth Debicki, diaphane, ne tombe jamais dans le ridicule quand sa frêle silhouette ploie sous l’assaut des oiseaux noirs.
Mais pourquoi la réalisatrice use-t-elle et abuse-t-elle des gros plans, comme s’il fallait scruter les visages de tout près pour en percer le mystère ? Un procédé qui alanguit le propos, comme la lecture récurrente des lettres échangées entre les deux romancières. Il faut alors les interventions jubilatoires d’Isabella Rossellini, « Madame mère » arc-boutée sur ses principes, ou les hésitations sentimentales de Ruppert Penry-Jones, remarquablement ambigu en époux de façade, pour apporter quelque élan à ce sage exercice, bien éloigné de la magnétique singularité de ses héroïnes.
(1) Il s’agit de son deuxième long-métrage
• Non ! * Pourquoi pas ** Bon film *** Très bon film **** Chef-d’œuvre
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire