Entretien avec l’auteur de «la Couleur des ombres».
Quelques questions jetées dans la boîte mail, Colm Tóibín ne venant pas en France pour la sortie de la Couleur des ombres. Et quelques réponses par retour du courrier. On ignore leur provenance, Dublin, Barcelone ou New York.
Pourquoi aviez-vous choisi comme titre original The Empty Family («la Famille vide») ? Que pensez-vous du titre français, la Couleur des ombres ?
Il est toujours difficile de choisir les titres ; c’est comme choisir des numéros de loterie. Souvent, il y a un titre que vous aimez dans la journée, et la nuit vous en aimez un autre. Je pense que «la Couleur des ombres» est objectivement la meilleure nouvelle du recueil, en tout cas d’un point de vue technique, et du point de vue de l’émotion. «La Famille vide» est plus cru, et plus expérimental, tout en monologue intérieur.
Le livre est dédié à Anthony Cronin. Comment le présenteriez-vous au lecteur français ?
Anthony Cronin est un poète irlandais, un critique et un biographe. Pour moi, il a écrit la meilleure biographie de Samuel Beckett, et je trouve sa biographie de Flann O’Brien révolutionnaire. Il est l’auteur de mémoires qui sont devenus un classique, Dead as Doornails (Bel et bien morts,Anatolia 2006). Comme poète, il jouit d’une grande considération en Irlande. Mais parce qu’il n’écrit jamais sur le paysage irlandais, ou toutes ces choses qui passent pour typiquement irlandaises, la réputation de sa poésie hors d’Irlande n’est pas ce qu’elle devrait être. Il est né dans les années 20 et vit toujours à Dublin. Nous sommes de la même ville ; mon père l’a eu comme élève, et son père à lui, de son côté, a appris à ma mère la sténodactylo. Cela fait bien des années que nous sommes amis.
Pensez-vous que comme auteur de nouvelles vous ne puissiez pas éviter la tristesse et la nostalgie ?
La nostalgie n’a aucun intérêt pour moi. J’espère l’éviter tout le temps ! La plupart des histoires, toutefois, sont bizarrement tristes. Et, sinon tristes, du moins mélancoliques. Mes romans sont comme ça aussi.
Est-ce plus facile pour vous, ou bien plus dangereux, d’écrire à la première personne ?
J’aime le risque que cela implique, l’intensité de ton que je peux obtenir. Il y a aussi que la plupart des histoires que j’écris à la première personne sont proches de l’autobiographie. Je m’efforce de garder mes distances, de ne pas parler beaucoup de moi, si bien que ces histoires-là arrivent par surprise, je ne suis pas le moins étonné.
Au cours de vos voyages, est-ce que vous achetez des objets que vous envoyez chez vous, comme le protagoniste de «la Famille vide» ?
Oui, je fais pareil.
Où vivez-vous ?
Je vis dans ma tête et, les bons jours, dans ma peau aussi. Je vis une partie de l’année à New York, où j’enseigne au département de littérature anglaise et comparée de l’université de Columbia. Sinon, en Espagne et en Irlande. Je ne suis pas sûr de savoir ce que «chez moi» veut dire.
Pouvez-vous écrire n’importe où ?
Oui, je peux écrire dans les chambres d’hôtel, dans des petites pièces et dans des grandes, dans mon bureau.
Internet et les ordinateurs ont-ils changé votre manière de vivre et de travailler ?
J’écris à la main. L’avantage d’Internet est qu’on peut se passer du téléphone.
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